Rappel du premier message :



Au Roi Borgne, les clients sont aveugles. Il y a beau avoir plein de trucs répréhensibles qui se passent sous leur nez, la politique de la taverne est de tourner la tête (ou risquer de se la faire tourner violemment). Gwen, ancienne pirate et tavernière reconvertie, est celle qui endurcit cette doctrine du chacun-se-mêle-de-ses-oignons (elle sait être très convaincante). Et elle est aussi badass que belle.
Je m'étais facilement trouvée une place dans le coin, même si ce n'est pas la seule taverne que je fréquente dans la ville. Ah ! Et j'ai aussi gagné assez de blé pour - attention - m'acheter des vêtements à ma taille !(Et à mon style). Je suis (relativement) riche !

J'me sens pourtant assez dénudée lorsque je pénètre l'endroit - car je n'ai pas ramené mon luth avec moi, l'ayant laissé aux bons soins d'une alchimiste pour l'ajuster un peu.
Sitôt, mon regard se pose en premier sur un dos familier. Et j'étire un grand sourire ; j'suis presque sûre que c'est mon ancien compagnon de voyage. Je remarque ensuite que Gwen est déjà en train de converser avec lui - de très près, même. Wow, son décolleté a bravé de nouveaux records aujourd'hui. C'est rare aussi qu'elle sert les clients elle-même. Pas sûr si elle flirt avec ou le menace par contre. Mais j'agis impulsivement, je suis trop contente de le retrouver alors je fonce jusqu'à sa table pour entourer mes bras autour de son cou. "Caïn !"

— Je récupère mes affaires et je te rejoints là bas, dit-il en souriant. Prépare aussi les tiennes. On ne prend qu'une chambre. Avec des lits séparés hein. Te fais pas des idées.

Je le regarde avec un air suspect. Pas à cause de ce qu'il vient de dire mais je sens quelque chose de différent chez lui. On dirait une bête avec les oreilles bien dressés. Enfin, il donne toujours cette impression, mais là c'est... plus marquant, bizarrement ? Je lui souris. "Ça marche. On se fera les ongles, et des batailles de polochons." Je dis avec la bouche en cœur et un regard rieur.

— J'ai rien contre une bonne bataille de polochon, confirma Caïn.

— Mon petit espion est en place, rendit compte Elissa. C'était pratique de connaître son compagnon de mauvais tours depuis des années. Plus la peine de verbaliser les choses.

— A tout de suite alors, sourit Caïn en prenant la direction de son ancienne auberge.

Layla partit de son côté également, et, ah, à ce moment son ventre grogna. Il devait être un peu plus tard que ce qu'elle pensait alors. Elle ne pensait pas pouvoir attendre Caïn pour manger. Et puis elle pourra toujours se permettre un deuxième diner après au pire...

Les chats aussi se dispersèrent de leur côté. Aucun d'eux ne suivit Caïn après sa démonstration de force - les magiciennes ne l'ont peut-être pas sentis, mais les félins si.
Même si les magiciennes étaient au courant de plein de choses concernant Caïn.

— Les chats ne te suivent pas et sont tous derrière ta petite puce, commenta la dragonne qui utilisait un petit oiseau clone de sang pour suivre la petite.
— Bien, dit simplement Caïn en continuant sa route. Il réfléchissait aux différentes actions à mener pour comprendre la situation. La petite était manifestement un objet de convoitise pour des mages. Il n'appréciait pas spécialement combattre des mages en pleine ville. Mais il avait plus d'un tour dans son sac contre ce type de prédateur. Après tout... le prédateur ultime restait Caïn.

C'est un autre genre de félin qui sortit de l'ombre. . Mais plus humain, celui-ci. Enfin, pas si évident pour les gens autour, mais un oeil experte remarquerait la différence en énergie.
Le chat restait en bonne distance pourtant, ayant une bonne vision de toute la ville grâce à ses petits minous. Lorsque Caïn s'approcha de l'auberge cependant, il décida de descendre de sa perche. Il préférait le rencontrer dans un endroit peuplé.

Caïn monta récupérer ses maigres possessions de voyage. Toutes tenaient facilement dans un sac à dos typique d'aventurier.

— Je pense que tu as un mage qui te colle aux fesses, dit Elissa.
— Parfait.

Il redescendit tranquillement et passa donner son congé à l'aubergiste. Ce dernier fut un poil surpris, l'homme avait payé plusieurs nuits d'avance. Mais visiblement il avait une urgence et surtout ne demandait pas de remboursement.

La dite mage reprit forme humaine tandis qu'elle rentra dans l'auberge. Elle dévoila ensuite son visage en laissant tomber son capuchon - pour elle aussi, sa beauté était une arme qu'elle mettait toujours en avant. Layla s'est forgée son éducation en s'inspirant de ce genre de femmes après tout - même si elle l'a tordu à souhait aussi.
La rousse s'approcha du dos de Caïn. "Alors, on abuse de la naïveté de ma petite soeur, monsieur le millénaire ?"
Et tout comme Layla, elle savait tordre le contexte et le tisser à son avantage.

Caïn se retourna lentement. Un autre homme pour le coup, le visage du traqueur. Carnassier et dangereux.

— Estimez-vous heureuses que je ne vous traque pas, dit-il froidement. Mais je peux changer d'avis si vous me forcez la main.

Inutile de prendre des gants avec des gens qui ont fini par en savoir un peu plus sur lui. Il n'aimait pas le concept et déjà dans son cerveau se formait l'idée de tous les tuer.

"Loin de moi l'idée de te provoquer." Dit-elle avec un sourire relativement froid. "Mais asseyons-nous, je me sentirai plus en sécurité cachée derrière une table et un bon thé." Dit-elle en tendant le bras pour lui indiquer une table.

Il se retourne vers l'aubergiste. — Un thé pour la dame. Et le reste de ma bouteille, ordonna-t-il. L'aubergiste acquiesça immédiatement. Puis l'humain millénaire se dirigea vers la table. Ses ongles coupèrent légèrement l'intérieur de sa main droite. Ils étaient comme des griffes acérées suite au renforcement physique qu'il venait de recevoir. Une fois installé son regard millénaire se plongea dans les yeux de la jeune mage. Qu'est-ce que vous me voulez ?

La magicienne entrelaça ses mains sur la table, regardant d'un air égale le millénaire. "J'irai droit au but." Elle sortit une assez grande pierre précieuse polie, ressemblant à une labradorite en la glissant sur la table. "Layla fait des siennes, encore plus que d'habitude. Et ça devient dangereux pour tout le monde, pas juste elle. Le soucis est  qu'on ne peut pas l'approcher. Cette pierre l'aidera à se décharger du surplus de magie sans avoir à passer par un rituel quelconque."

Il récupéra l'artefact et l'empocha dans une même mouvement. Le geste était naturellement rapide, pas comme s'il était pressé. Juste qu'il se déplaçait vite pour le moment.

— Une nouvelle méthode pour lui absorber son énergie si je comprends bien, affirma Caïn. Il est peu probable qu'elle l'accepte. Mais je peux me tromper. Elle est tellement imprévisible. Sand compter le fait que je vais l'étudier avant de lui proposer de l'utiliser. Ne croyait pas une seconde que la magie de ses tatouages m'est inconnu. Cependant il va falloir me donner accès à vos recherches. Elles sont plus récentes que les livres antiques à ma disposition.

Elle écarta les bras avec un sourire froid. "Je l'aurai fait volontiers, mais, hélas... Layla a tout brûlé sur son passage. Dont les corps de mes treize autres soeurs." Elle laissa son sourire s'effacer en entrelaçant ses doigts de nouveau. "Si je cherchais réellement à me venger d'elle, probablement que je la laisserais se ruiner toute seule plutôt qu'intervenir."

— Se venger d'elle est un prix que seuls des fanatiques suicidaires peuvent s'offrir. Pour des gens désirant survivre à cette vengeance le prix est désormais trop élevé à payer, commença Caïn. Décrivez moi le fonctionnement de votre artefact, ses effets primaires et secondaires.

Elle ne répondit pas tout de suite, car on ramena les boissons commandées. Elle prit son temps ensuite pour déguster son thé avant de répondre. "Déjà, pour une personne lambda, même millénaire, éviter de laisser la pierre au contact de la peau." Elle n'avait pas besoin de sourire pour indiquer sa froideur. "Il s'agit d'une larme de Laguna. La pierre est unique, impossible d'en trouver une autre dans le genre, pas avant très longtemps du moins. Alors qu'elle y fasse très attention. Qu'elle dorme avec, contre sa peau. Elle se réveillera probablement de mauvaise humeur, mais tel est le prix à payer pour une meilleure stabilité."

— Qu'est-ce que vous avez à y gagner ? demanda Caïn très suspicieux des intentions de la mage et de son ordre/cercle/confrérie.

"Je n'ai rien à y gagner, à part limiter les dégats de nos erreurs passés." Dit-elle calmement sans sourire cette fois. "Je n'aurais pas dit non contre récupérer la pierre pour la vider de la magie accumulée de temps en temps, mais je me doute déjà que Layla sera contre."

— Elle ne vous doit rien en effet, confirma Caïn. Et je ne vous fais pas confiance. Ne le prenez pas pour vous. C'est plus un art de vivre qu'autre chose.

Elle sourit de nouveau en se levant. "Peut-être que cela changera un jour. On a toujours besoin de mon grain sel." Elle se traguait d'avoir en tête les recherches concernant l'expérimentation de Layla, donc qu'elle était trop précieuse pour tuer. Du moins, elle espérait avoir engrainé cette possibilité déjà dans la tête du millénaire.

Il se lève aussi. L'instant d'après sa main gauche entailla très légèrement le poignet de la mage avec une lame minuscule. Et sa main droite vint se poser sur la blessure. Le tout se déroula en un temps plus record. Je pratique aussi des expériences à mes temps perdus. Elles sont généralement inoffensives... tant que je ne me sens pas menacé. Son sang se mélange à celui de la mage. N'en prenez pas ombrage, c'est encore la méthode la plus douce à ma disposions.
Son regard change à nouveau alors que son sang vient remplir le blanc de ses yeux et que des rides apparaissent aux coins de ce dernier. Un regard trimillénaire, abyssal.

La magicienne eut une chair de pouls préméditant le rituel qui vient de se passer. Elle était horrifiée par la perspective que sa liberté était menacée. Mais bien qu'elle était en mauvaise posture - et surtout car elle se trouvait en mauvaise posture, elle se força à lisser son expression, la décorant de nouveau de son sourire glacial. "...Tu signes de ton sang toutes celles que tu désires ? Ma pauvre petite sœur serait triste d'apprendre qu'elle n'est pas si unique..."
Malgré son expression calme, ses battements de coeur étaient loin de l'être. De la sueur froide se formait à son dos.

Il ne dit rien et se contenta de plonger son regard dans celui de la femme. Elle n'était plus en face d'un être humain. Elle était dévorée par une aberration monstrueuse qui visiblement n'appréciait pas l'humour de la femme. Il tenait toujours fermement son poignet, d'une poigne inéluctable. Ses lèvres s'étirent lentement, et un sourire vraiment glacial pour le coup, se forma sur le visage du monstre. Ses yeux mirent au défi la mage de prononcer un mot de plus. Les yeux d'une créature si ancienne que la mage n'était qu'une insecte sans importance en comparaison. Le genre d'insecte qu'on écrase par inadvertance.

Ses épaules se retractèrent malgré elle, c'était une réaction instinctive. Elle fit aussi un autre pas en arrière en pinçant les lèvres - la peur était clairement visible dans ses yeux. Une peur liquide se propageait dans tout son corps, la paralysant complètement malgré qu'une partie de son cerveau lui criait de s'enfuire. "..." Et elle en perdit même sa voix.

Soudainement le visage de Caïn redevint celui d'un jeune homme aux traits parfaits, à la peau laiteuse et sans la moindre difformité. Les yeux redevinrent les yeux sans vie qu'il arborait tous les jours. Son sourire glaciale le quitta et son expression neutre reprit le dessus.
— Je n'ai aucun désir d'interférer avec vos affaires, ne faîtes rien qui nuise à la petite et vous vivrez longtemps. Ne cherchez pas à comprendre ce qui est désormais dans votre sang, un mécanisme de défense se mettrait en place et vous tuerait. Ce qui n'est pas mon intention. Comme je le disais je ne vous fais pas confiance, je prends donc des précautions. Clair ?