Hmm... J'serais sûrement resté dans le cockpit pendant quelques heures, écoutant la radio et en mangeant des macaronis en boîte de conserves. Pas grand chose. J'serais pas sorti en tout cas. J'peux mettre un masque ? J'ai pas trop peur de me faire repérer. Ca ne devrait pas être la première fois qu'ils voyaient une sale tête, ces gens, si ? Et les pirates n'avaient pas vu nos gueules de toute façon.

"Un masque ?" Je le regarde d'un drôle d'air. "Tant qu'on en voit assez pour qu'ils croient pas que tu veux les braquer... et que t'as des papiers à donner si on te contrôle..." Je finis par hausser les épaules. "Fais comme chez toi." Je cherche l'ouverture de la porte et je sors. Pfouah, ça fait du bien. Je secoue un peu mes cheveux - trempés, merde, j'espère que je vais pas attraper la mort - et je descends en quête du café, des snacks, bref des commodités de la Civilisation.

J'préfère pas mettre de masque si c'est pas nécessaire et elle semble penser que j'en ai pas besoin (ou bien elle se d'mande juste pourquoi j'ai un masque — j'ai jamais réussi à lire les expressions des gens comme ça). Je sors sans cacher mon visage, mais prépare mes papiers vu qu'elle me rappelle de les emmener. Je la suis, ou... ? Je la suis.

Il suit. Bon. Je fais quelques pas et je le laisse arriver à ma hauteur. Il est redevenu pas doué, j'ai l'impression d'avoir un gamin à surveiller. Donc je surveille. "Allez, presse-toi un peu, si les copains nous voient dehors on est mal. Café, bouffe, chiottes si y faut. Quand on sera dedans faudra surveiller si le vaisseau de tout à l'heure vient pas se poser innocemment et nous siphonner la cargaison." Ou nous siphonner nous. "Et agir en conséquence."

Ok. J'sais pas quoi dire d'autre. (J'aime pas le café, peut-être.) Elle a raison et elle semble avoir la situation en main. J'me fais pas trop d'soucis. La populace de cette station n'arrête pas de nous suivre du regard, par contre. D'abord j'pensais que c'était à cause de moi — j'ai l'habitude d'être fixé par les mômes — mais j'pige qu'en fait c'est Sara qui fait tourner les têtes après un moment.

Pisak, s'vou'plaît. Les premiers mots qui sortent de ma bouche depuis le débarquement. À un barman, bien entendu. Ce truc dégueulasse marche mieux qu'un café pour rester attentif et réveillé. Le barman arque un sourcil quand il capte que Sara est rentré avec moi, mais il me serre mon verre quand même. C'est si bizarre que ça ? J'tourne la tête vers la femelle. Um, tu veux quoi.... ?

J'ignore le barman. Je regarde dehors l'air de rien, aucun mouvement suspect. "Café." Je pars donc en quête des trucs à grailler, des qui font pas trop grossir peut-être... oh et puis merde, j'ai failli crever, je risque de faillir crever encore, si ça se trouve je les verrai jamais ces kilos en trop. "Pis un sandwich au poisson, deux Tchax et une bouteille de Cowa-Bunga." Je fais un grand sourire à ces messieurs et je vais vers le petit panneau indiquant les toilettes. S'il a les sous, j'te parie cent balles qu'il paiera aussi ma part.

HRP:

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Un pari facilement gagné, ça. J'paye et j'attends. J'vais pas la suivre aux chiottes quand même. S'il y a une limite, ça doit être celle-là. J'finis mon verre d'un trait. Mon doigt se lève tout seul, obligeant le mec à me remplir le verre encore une fois. Ca stabilise les nerfs, ce truc.

Je reviens tranquillement, je refais le sourire étincelant et j'attrape le sandwich que je commence à mâchonner, assise à côté du transporteur, dos au bar et les yeux vers l'espace. Officiellement parce que j'aime bien contempler le vide intersidéral et méditer sur l'insignifiance des formes de vie conscientes. Officieusement pour surveiller si un vaisseau suspect ou des types suspects seraient pas en approche.

J'ai le nez dans le verre. Si quelqu'un me demande de faire une partie de poker, j'suis sûr d'accepter. Au moins j'ai arrêté de stresser. Pas de sueur. C'est beaucoup moins suspect. Z'êtes vraiment jolie, mam'selle, un mec accoste Sara. Il a bu encore plus que moi, c'ui-là. Z'êtes toute seule et tout et tout ?

Il passe son regard de ma tête vers Sara, puis retourne vers la mienne. Quoi, lui ??? Quoi, moi ? Ah non. J'préfère pas me mêler de ça, moi. J'sais bien que si j'suis les histoires gnan-gnan j'suis censé dire un truc, mais j'préfère pas m'enfoncer dans un trou. Mon expression choquée semble être mal-lu. Woah woah, pas besoin d'me taper ou quoi, mec. J'veux juste dire que t'es plus laid que le derrière d'un Xzblorg et qu'elle est... Il laisse bien traîner les yeux. Genre l'inverse ? Canon, p'tain.

Tiens, j'aurais pas parié sur le fait que le chieur ait encore assez de lucidité pour avoir la trouille et pas essayer directement de lui en coller une. En fait c'est pratique ça comme technique. Si ça se reproduit, je sais quoi faire... ohputainmaisjevaisluipéterlenezàceconnard !"Ouais, je sais. Mais bon tu sais, la beauté intérieure, toussa. Allez, va, sans rancune." Si tu continues à me reluquer les nibards par contre ça va barder pour toi.

Ca y est. Il est vide. Il va bouder plus loin. J'ai eu chaud pendant une p'tite seconde. Ou deux. Ou trois. Il n'était pas très motivé au final. J'lance un regard à Sara, mais je dévie mes yeux vers mon verre avant qu'elle capte (ou j'espère). La pauv'. Ca doit être encore plus chiant pour elle que pour moi. Au moins on m'laisse tranquille quand j'bois.

Je retourne bouffer mon sandwich avec un regard noir sur le dos du chieur. J'espère que le type à côté de moi a pas cru que j'étais sérieuse, j'ai pas besoin d'un deuxième lourd sur le dos, surtout que lui j'en ai besoin pour arriver vivante à Manooine. Faudrait que j'y explique, ptet. "Le prends pas trop au sérieux hein." je marmonne pour pas que l'autre m'entende.

De quoi ? Que j'suis moche ou le coup de la beauté intérieure ? Ou p'tet qu'elle est avec moi ? Pas envie de lui demander, donc j'dis juste ok, comme d'hab. Que j'suis pas avec elle, ça je sais. Enfin, j'veux dire, elle est là avec moi mais juste pour le transport quoi. Que j'suis pas très beau à l'extérieur j'avais pigé aussi (les années de "OH PUTAIN C'EST QUOI CE TRUC ?" oblige). Et qu'elle était pas sérieuse à propos de la beauté intérieure j'pense avoir compris après l'émission radio.

Une seconde j'ai presque de la peine pour lui. Ca doit pas être facile à porter une dégaine pareille. Faudra que je lui explique que quand je disais que j'étais avec lui, je pensais à un "avec"... avec, quoi. Que j'étais pas venue seule dans la station. Ya des limites aux crasses que je peux faire en toute bonne conscience, quand même. Trouver un truc, trouver un truc. "T'en veux ?" Je lui tends un des Tchax. "C'pas bon de piloter avec juste ça dans le coco, faut manger aussi."

C'vrai que la voir manger donne faim. Mais je pensais plutôt à mes macaronis en conserve, pour être honnête. La politesse veut que j'accepte son offre. Ou est-ce qu'elle veut que je refuse, parce qu'elle a vraiment pas l'air du genre à partager ? J'suis plus sûr. J'lui fais pitié, c'est ça ? Um... Je fixe le truc qu'elle me tend et je l'accepte. J'ai jamais goûté.

Jamais goûté ? Mais tout le monde a déjà goûté des Tchax enfin ! Il a vécu où ce type sérieux ? "Rho. Tu sais pas c'que tu rates. Sauf si t'aimes pas le chocolat et le caramel. Ou les biscuits. " Je bois une gorgée de café tant qu'il est encore chaud, et je continue à faire un sort à mon sandwich.

Bof bof. J'préfère mes nouilles et mes macaronis. C'pas mal. J'ai encore des miettes collées aux lèvres. On m'a toujours dit que j'étais pas assez civilisé pour être invité au resto. J'ai toujours pensé qu'on parlait des bonnes manières, mais peut-être c'est plutôt parce que mes goûts de bouffe sont juste trop bizarres. J'pense pas qu'ils vont se pointer. J'parle des pirates bien sûr, mais c'est p'tet faux. Z'ont tendance à te surprendre, ces gens.

Ah merde elle m'a fait rire. J'me suis imaginé derrière un cactus. C'était plutôt rigolo. J'me couvre la bouche par réflexe, comme si j'viens de commettre une grave erreur. Ca doit être parce que mon rire est désastreux (comme l'avait dit ma mère). On y va, alors ? J'me lève pas tant qu'elle n'est pas levée non plus.

...c'était quoi ce bruit ? Il a rigolé ? Putain il m'a fait peur, j'ai cru qu'on égorgeait quelqu'un. J'essaie de pas trop montrer que j'ai été surprise et je finis d'enfourner mon casse-croûte. "On y va ouais." J'embarque mon Tchax, mon Cowa-Bunga, je finis mon café et j'me lève. "On a encore de la route."

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Un peu, oui. Celur-Manooine, c'pas un trajet fait en deux jours. J'me lève aussi. Au final ça va, avec la femelle. Enfin, j'pense que j'm'en sors plutôt pas mal. Elle me fait stresser comme pas possible, c'est vrai, mais elle n'est pas bien méchante au final. J'ai vu pire, quoi. (Mais j'préfère pas parler trop vite. J'l'ai pas encore vu fâchée pour de vrai de vrai.) Pas besoin de pause pipi pour moi. Pis y'a des chiottes dans le vaisseau. Direction sortie, donc.

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