A sa grande honte, il lui a fallu une journée entière pour cesser de se sentir mal dès que son dos se trouvait sous l'ombre d'un arbre. Leif a cependant dû se frayer un chemin dans la forêt pour relever ses collets, établir son besoin réel de viande fraîche et effectuer un premier repérage. La présence rassurante de son fidèle Krákagrár et les facéties de cet idiot de Puffífl y sont beaucoup dans sa récupération, ainsi que la douceur de la voix de Hind qui guide ses rêves loin des cauchemars.

Les prises sont mitigées. Il a dû trop tarder la vieille au camp et des concurrents sont passés avant lui ; il a repéré des traces de renards et, plus dangereux, d'un loup. Partager son territoire avec une meute ne le rassure jamais. Il n'a rien contre ces majestueux prédateurs mais il lui est difficile de dormir sur la seule oreille qui lui reste en craignant une attaque sur Krákagrár. Le petit cheval est tout à fait capable de tuer des loups mais une blessure, même superficielle, n'est jamais souhaitable dans ce monde ; il espère qu'il ne s'agisse que d'un loup solitaire de passage. A vérifier.

Pour l'heure, avec deux maigres lapins, il sait qu'un daim ne suffira pas s'il veut ramener une prise au Camp. Un cerf ou un sanglier semble plus indiqué. Peut-être deux proies, pour renflouer son stock de viande fumée tout en ramenant une belle prise au Camp.

Leif s'est donc posté au point de rencontre, attendant Dina.

Ina (et non Dina, elle se préfère sans "D") se pointe au point de rendez-vous, réglée comme une horloge. Elle a apporté son arc, évidemment, son cahier d'explorateur pour prendre des notes et du matériel pour limer l'arc et les flèches. Eyra est comme toujours sur ses talons. Cela fait deux jours qu'ils ne se sont pas vus et comme chaque fois, on a peur de ne pas revoir l'autre mais il est là.
"Bonjour Leif, comment vas-tu ?"

"Bien." répond laconiquement Leif mais il évite toujours de passer sous l'ombre d'un arbre, et ses détours ne sont sans doute pas très discrets. Il tend une carte vers Ina : "J'ai noté en rouge les spots où on pourrait trouver du gibier. Et en bleu, les sentiers les plus usités. Ya un gros sanglier dans le coin, j'ai encore trouvé des traces fraîches hier." Il a même des poils, si Eyra est douée en pistage. L'Islandais zieute la chienne, un sourcil arqué par son questionnement. "Tu l'as déjà utilisée pour chasser ?"

Ina regarde la carte puis réfléchit à la question de Leif.
"Hum... Pas vraiment, je l'ai dressée pour me signaler la présence de morts-vivants et de personnes, ou protéger une personne désignée, guère plus."
C'est qu'elles faisaient une autre sorte de repérage : celui des boîtes de conserve. Plus courant en ville.

"Dommage, j'ai des poils." Il pense de plus en plus à chercher un chien de chasse à éduquer, ça pourrait lui être vraiment utile. "On va faire autrement. On repère l'animal et on préparer un piège en tenailles : je le pourchasse à cheval et tu l'attends à l'arc là où je le rabats." Il préfère rester en mouvement même quand il chasse. "Je propose le ravin du sud-est de la forêt, suffisamment dégagé pour voir arriver et notre proie et de possibles zombards. Tu en dis quoi ?"

Ina cherche du regard la branche pour le nouvel arc de Leif mais ne le trouve pas. Elle se résigne à l'écouter décrire le plan : une battue.
"D'accord. Ce ne sera pas trop difficile pour toi tout seul ? Est-ce qu'Eyra ne peut pas aider ?"
Cibler une cible d'en haut est toujours plus facile que l'inverse. L'archère fera de son mieux.

"Elle sait rabattre ?" demande-t-il en haussant un sourcil. Il a supposé que non, vu qu'elle n'a pas été éduquée pour la chasse. "Je veux poursuivre ce gros mâle. Krákagrár est habitué à leur faire face mais ta chienne pourrait finir éventrée." prévient-il d'un air prévenant. Il se frotte le menton d'un air songeur. "Il faudrait que je me trouve un gros chien de chasse... Surtout pour le prochain voyage." Sa voix n'est devenue qu'un filet marmonné alors que ses yeux dérivent vers l'est.

"Je ne sais pas, c'est une chienne de garde donc elle est dressée pour protéger. Tu crois qu'elle risque de se jeter sur un sanglier ? Elle a bien plus l'habitude des zombies ou des hommes armés..."
Ina s'en remet totalement à Leif sur ce coup, elle n'y connaît rien à la chasse.

"Même sans qu'elle se jette dans ses jambes, le sanglier pourrait se retourner pour charger." Il a failli perdre Krákagrár la première fois, ne s'attendant pas à une volte-face si violente. Les gros mâles sont bien plus impressionnants qu'on ne le penserait, vu de près, et leurs défenses font mal. "Mais si elle reste à distance en aboyant, il me sera plus facile de diriger la bête vers ton spot."

"Et crois-tu qu'elle pourrait se mettre sur ta selle et aboyer ? Je ne sais pas comment lui ordonner de rester à distance. Sinon, je la garderai avec moi..."
Eyra, c'est son dernier souvenir de sa vie d'avant... Ça et les BDs au camp mais ce sont des objets, Eyra est vivante.

"Je ne suis pas sûr que Krákagrár apprécie le chien aboyant sur son dos..." Il est habitué aux criaillements du macareux mais pas à la bestiole poilue qui ressemble fortement à un loup. Il agite encore les oreilles en arrière quand elle s'approche, malgré qu'ils se connaissent un peu maintenant ; l'instinct de tuer le loup est très fortement ancré en lui. "On pourra travailler ça une autre fois. De toute façon, il faut encore voir pour l'arc. Me fait pas confiance pour une si grosse bête, débutant que je suis." dit Leif en souriant en coin, montant d'un bond sur son cheval. "Tout est bon pour moi, des questions ?"

"Non, je vais y aller avec Eyra et je me prépare à tirer sur le sanglier."
Il est plus que temps de se mettre en route si elle veut rentrer avant la nuit.

A sa grande déception, le sanglier a traversé un cours d'eau et sa trace se perd sur l'autre rive. Il lui faut une bonne heure pour retrouver la piste et remonter jusqu'à l'animal. Comme il s'est plus éloigné qu'il ne le pensait au départ, Leif prend de la hauteur pour examiner les environs en quête de zombies. Il ne semble pas en avoir et il est suffisamment moins d'Ina pour partir dans l'autre sens si son tintamarre en attire ; il n'a guère le soin pour faire partir la bête sans le sens désiré sans chien. Attrapant le sifflet accroché à son cou, il siffle un bon coup tout en agitant son tambourin à balle. L'animal bondit en avant.

Ina attend. Elle attend longtemps, une heure à en juger par la course du soleil. Eyra a quitté son poste depuis longtemps pour se dégourdir les pattes autour du post d'Ina. Cette dernière surveille les mouvements en contrebas en se demandant si Leif n'a pas eu de souci. Soudain, le vent porte à ses oreilles un bruit de sifflet.

Il fait un boucan à réveiller les morts pour effrayer le sanglier afin qu'il aille dans le sens de son rabattage. Heureusement qu'il sait qu'aucun zombard ne traîne dans le coin, car il a passé les heures du petit matin à patrouiller sur son territoire de chasse sans en voir un seul, même de loin ; et le macareux veille dans les airs. Le galop puissant de Krákagrár talonne la bête de près, le souffle endiablé de ses naseaux fouettant la croupe du sanglier. A un moment donné, ce dernier fait mine de se retourner mais les sabots cabrés de l'étalon à la crinière virevoltante l'en dissuade ; il se remet à courir droit vers Ina.

Ina voit le sanglier coursé de près par la monture de Leif (Krákagrár), elle bande son arc et vise. Elle s'applique mais une petite voix dans sa tête lui dit qu'elle risque de blesser le cheval de Leif si celui-ci accélère brusquement. Elle lâche la flèche mais celle-ci se plante trop devant le sanglier, obligeant ce dernier à éviter la flèche ou à la pulvériser par la force de son élan.

Depuis l'impact perdu de la flèche dans le sol, le sanglier roule des yeux d'un air affolé et Leif sent bien qu'il est prêt à faire volte-face pour défier le cheval plutôt que ce nouveau danger. Il ne compte pas le laisser faire ! Comme l'animal n'est pas encore prêt de sortir du goulot d'étranglement, il relâche son fusil pour faire à nouveau tinter et siffler ses instruments ; pas la peine de gâcher une munition si Ina peut l'avoir sur la prochaine flèche. Krákagrár se tient à distance du sanglier pour lui barrer la route : il n'a de toute façon plus le choix, il ne peut qu'avancer dans leur piège.

Ina n'a pas attendu pour préparer une nouvelle flèche et réparer son erreur. Car c'est Leif qui en payera les conséquences ! Elle vise la tête de la bête et tire. La flèche se fiche au dessus de son groin. Ce dernier hurle à la mort. Ina discerne du sang couler le long du masque du sanglier mais la bête s'excite davantage. La jeune femme prépare une nouvelle flèche pour réparer ses maladresses.

Comme ils ont convenu de chasser en groupe, Leif n'a pas creusé le piège qu'il prévoit normalement pour ce type de gibier ; une opération longue et harassante, mais qui économise des balles. La chasse en rabattage, sur le mode des loups, lui a semblé plus logique. Mais force est de constater qu'ils ne sont pas encore aussi organisés qu'une meute. Heureusement, l'Islando-Norvégien a prévu trois gros épieux taillés à la va-vite dans des branches solides. Une touche sur le flanc et Krákagrár bondit vers le sanglier tandis qu'il arme son bras pour planter puissamment l'épieu qui s'enfonce dans l'épaule de la bête couinante. "Ina ! Finis-le !"

Le sanglier est déjà bien amôché. Il se couche sur le flanc en signe d'abandon, attendant sa délivrance. La troisième flèche d'Ina perce la gorge du sanglier, la tâche devient plus facile quand la cible ne bouge plus. Des zombies auraient arracher les tissus, des humains doivent être plus cléments que ça.

Comme Krákagrár a accompagné son élan, la pointe de l'épieu, quoiqu'en bois, a réussi à s'approcher du coeur de la bête dont Ina abrège les souffrances. Leif met pieds à terre et s'approche du sanglier pour vérifier qu'il est bien mort. "Merci à toi, tu nous nourriras de ta force." murmure-t-il en islandais. Des rires étouffés semblent lui provenir aux oreilles et il ne peut s'empêcher de rouler des yeux. "Gnomes... Je ramènerai une part pour le peuple de la forêt, cessez vos enfantillages." Ce n'est qu'en se retournant vers le sanglier pour le charger sur son cheval qu'il se rappelle qu'il ne chasse pas seul ; ses yeux s'écarquillent.

HRP:

Ina prend donc le chemin pour descendre et rejoindre Leif. Elle reconnaît avoir manqué de précision avec ses tirs.
"Je suis désolée, je manque visiblement d'entraînement sur des cibles mouvantes, dit-elle en arrivant, Eyra sur ses talons. "On ne le dépèce pas ici ?"

Ina n'a donc que faire qu'il parle tout seul. Tout va bien. Sans doute qu'elle a cru qu'il marmonnait à son cheval, ou des remerciements au sanglier. Les gnomes n'en rient que plus et Leif se mord la langue pour ne pas leur répondre vertement. "Je n'ai pas envie d'attirer des loups, ou pire, un ours." répond-il à Ina en se levant détacher une bâche des fontes de Krákagrár en prenant également des cordes. "Et c'est pas grave pour les flèches ratées. Moi, au début, je gâchais des munitions." Déposant la bâche près du sanglier, il tendit une corde à Ina. "Aide-moi à l'emballer. Le sang sur le cuir, ou les poils, ça part mal."

"D'accord..."
Je pensais qu'il avait veillé à ce que la zone n'en contienne pas mais il a raison, il vaut mieux être prudent même si ça nous encombre.
Ina aida donc Leif à monter le sanglier empaqueté sur le cheval court sur pattes.
"D'habitude, tu retournes au camp pour échanger la moitié contre d'autres denrées, non ? Cela ne va pas nous encombrer pour la fabrication de ton arc ?"

"J'ai un spot pour m'occuper de la carcasse." lui dit Leif en finissant d'accrocher le paquet sur la croupe de Krákagrár. "C'est plus en hauteur, et éloigné des charognards. Je peux récupérer la peau, les os et les tendons si je n’emmène que la viande au camp. Ils préfèrent avoir les morceaux plutôt que la bête entière." Des murmures reprennent autour d'eux et Leif se détourne imperceptiblement d'Ina pour adresser une grimace aux ombres, mimant un "Plus tard." en islandais. Que ces gnomes sont impatients !