Elle releva la tête, cherchant à savoir ce qu'il voulait dire vu qu'elle-même avait parlé ni posé de question. "Oh" fit Ash en pigeant ce qu'il voulait lui montrer. Elle avait l'impression de parler à un enfant timide plus qu'à un adulte. "Mais heu... t'as jamais pu le remplacer ? Ça fait longtemps ?" Elle ignorait si une blessure trop ancienne pouvait toujours être greffée. Loin d'être rebutée devant l'apparence de Ryot, elle était plutôt inquiète pour lui. Presque... soucieuse.

C'est cher. Une réponse. Point bonus pour Ryot s'il ajoute plus d'info. Mais non, il se tait. Y'a pa de suite. Ah si, mierda. Elle a posé une deuxième question. Comme d'habitude quand on lui en pose plus qu'une, il focalise sur un seul truc. Dur-dur de diviser son attention. Et euh... Il a essayé, mais non bis. Il se rappelle déjà plus de sa deuxième question. Mémoire courte. Trouble d'ADN ou juste stupide ?

"Ouais, ça je confirme... j'en cherchais un à la boutique mais vu le prix pour de la camelote, non merci." Enfin, son œil ne buguait pas trop en ce moment, juste une ou deux micro-coupures par jour. A l'énième "heu...", Ash comprit qu'elle l'avait perdu. En fin de compte,  Ryot ne semblait pas si méchant qu'on pouvait le penser. Il fallait juste être patient. "Ça fait longtemps que tu as perdu ton œil ?" réessaya-t-elle en retournant à son bricolage.

Chai plus, avoua-t-il en toute honnêteté. Entre 4 et 6 années peut-être. Il a la mémoire courte, j'ai dit. Il s'est aussi prit le poteau dans la gueule quand il a perdu l'oeil donc faut dire que ça n'a certainement pas aidé. P't'êt 5 ans. C'est entre les deux.

Oui, dit-il simplement. C'était utile, c'est vrai. C'était aussi ce qu'il faisait pour gagner son pain. Et vraiment le gagner — les courses c'est pas toujours rentable. Regardez-le. Sa passion lui a littéralement coûté un bras (et un œil !). Limite ça lui coûte de l'argent de faire des courses en speeder. Mais j'ai pas d'contrat là.

Un petit "cling" retentit quand une pièce sauta du bras de Ryot. Ash ouvrit de grands yeux sous la surprise, pas trop sûre qu'elle n'ait pas merdé un truc quelque part. Elle se pencha pour la ramasser et vérifier qu'elle n'avait rien endommagé. "Ça s'trouve des contrats. Tu as des employeurs sur Manooine ? Quels genr..." Mais elle se stoppa. Une question à la fois ma grande, où tu vas encore le perdre. "Ahem, les employeurs ?" se reprit-elle.

Elle avait changé la question. Ryot était à la fois soulagé (parce qu'il devait pas retenir les questions) et embarrassé (parce qu'elle devait s'adapter à son niveau merdique). Il optait de focaliser sur le soulagement s'il voulait pas virer en embarras total. Je les connais pas. On me donne juste les instructions. D'abord ils passaient à travers Anarchi, mais depuis quelques années le transfert d'infos était fait en direct sur son holophone.

Apparemment la technique du "only-one-question" semblait fonctionner, Ryot parlait d'avantage. Maintenant qu'elle avait le mode d'emploi, Ash saura s'y adapter. "Tu penses qu'il y a moyen qu'on se déniche un p'tit boulot d'ici-là ?" Elle ne voulait pas qu'il reste trop longtemps avec un bras hors d'usage, trop dangereux par ici. "Je t'aiderai à le faire, t'inquiète pas."

Il haussa vaguement les épaules. Enfin... un épaule. Je sais pas. Normalement c'est pas moi qui demande. Comme il l'avait dit, ses jobs venaient à des moments inattendu. Ses employeurs (inconnus) le sollicitaient pour aller de point A à point B avec colis X. Ce système fonctionnait à merveille. Je peux demander à Anarchi. Il avait toujours des choses à faire pour des crédits, lui. Les jobs n'étaient pas aussi paisibles par contre.

Donc. Il venait de dire qu'il ne connaissait pas ses employeurs mais il lui balançait tout de même un nom. "Anarchi est ton acolyte ?" tenta-t-elle de deviner.

Non. Il secoua la tête. C'est quoi un acolyte déjà ? Des alcooliques, il connait. Pas sûr de l'autre truc. En tous cas Anarchi ne l'est pas, ou bien il aurait déjà entendu le mot. C'est mon ami. Frère adoptif ? Pas officiellement. Évitons plus d'explications. Il a souvent du travail.

Quelque part, ça rassurait Ash de savoir que Ryot n'était pas seul. Peu dégourdit comme il semblait l'être aux premiers abords, elle craignait un peu que des personnes mal famées en profite. "Tu peux le contacter d'ici sans problème ?"

La rousse se rapprocha de l'hologramme, intriguée de voir l'ami en question. Un zangolais ? Ryot était décidément plein de surprises. "Hello ? Pas de panique, il va bien et est en sécurité" s'avança Ash. Le gus semblait être du genre à s'attirer les ennuies, mieux valait commencer par le début. Enfin le second point, le premier aurait été de se présenter (foutues conventions sociales). "Moi c'est Ash et on aurait besoin de votre aide."

Je panique pas, répondit Anarchi en croisant les bras comme s'il devait défendre son honneur. Anarchi n'est PAS une maman poule, ok ? Je suis curieux. Nuance. Il fit quand même mine de secouer la main invisible d'Ash. C'était une jeune demoiselle après tout. Fallait garder un semblant de politesse. Lui je sais qu'il a besoin d'aide (tu l'as vu un peu ???), mais toi, comment puisse-je... euh, peux-je... euh... piercke-je.... Il se racla la gorge. Comment j't'aide ? Mieux.

Entre l'humain en kit et le zangolais protecteur, Ash était tombée sur un sacré duo... "Son bras est en vrac, il ne peut plus du tout le bouger. C'est réparable à mon niveau mais il me faudrait de nouvelles pièces... et des crédits pour ça." OK, c'était direct mais elle ne comptait pas tourner autour du pot éternellement. Et quitte à manquer de délicatesse... "Y'a moyen de nous dégotter un petit boulot pour rentrer dans nos frais ?"

Qu'est-ce que t'as fait avec ton bras encore, l'autre ? Anarchi fit une fausse mine étonnée. Il ne l'était pas. Nan, me répond pas. Un p'tit boulot, hmmmmm... ? J'ai deux trois trucs dans le four. C'est possible. Il caressa sa trompe comme un vieux sage pourrait le faire avec une barbe. Le fait qu'elle soit direct ne l'avait pas effrayé. Ryot en était soulagé aussi. Quel genre, dîtes ?

Ah ça c'était amusant comme question. "Ryot n'est pas livreur ?" demanda tout de même la rousse. "En ce qui me concerne, tant qu'il ne faut tuer personne -ni me prostituer- tout me va."

Roooh, bah ça élimine déjà la moitié des possibilités. L'hologramme restait statique alors qu'Anarchi se déplaçait. Il prit une tablette en main, puis continua : Roooh, bah ça élimine déjà la moitié des possibilités. Bon. J'ai deux livraisons. Une avec cargaison délicate, livraison à l'autre hémisphère. Paye pas mal. L'autre moins loin et moins délicate, mais... ça va pas rapporter grand-chose.

"Je rappelle que notre livreur a un bras en chiasse ?" Non parce que traverser la moitié de la planète dans son état, même si elle aidait, ça risquait de ne pas le faire. Quoique... qu'est-ce qu'elle en savait ? "Tu préfères quoi mon beau ?" demanda Ash au concerné. Ryot devait au moins jauger ses propres limites (ou du moins, elle l'espérait franchement pour sa santé).

"Mon beau ?" répéta Anarchi en même temps que Ryot (mais lui pas à haute voix). On parle du même Ryot là ? L'hologramme plisse les yeux, comme si ça allait rendre l'image moins flou de son côté. Même comme ça Anarchi était relativement sûr qu'il n'y avait pas deux mecs aussi moches que lui sur cette planète. Ca m'est égal. Ryot trouva mieux de répondre. Peut-être que ça ferait changer le sujet.

Elle eut un soupire - "C'est pour ta pomme vieux." - et s'adressa de nouveau à Anarchi en évitant de relever la blague douteuse sur le physique du borgne. Ah tient d'ailleurs. "La mission qui remporte pas mal dans ce cas. Ça évitera de me limiter dans le coût des réparations de son bras et peut-être, j'dis bien peut-être, voir pour un oeil bionique plus tard." Au moins économiser...