Rappel du premier message :

Maksim attend de revoir la petite bergère. Elle est derrière la porte. Il est quasi sûr de ne pas s'être trompé, qu'il n'existe qu'une seule petite fille blonde fan d'appareils volants avec un gros chien de berger originaire des environs de Tomsk mais le doute est toujours possible avec cette étrange femme pilote d'avion postal.

Comment va-t-elle ? A-t-elle changé après ces deux ans d'absence ? Se souvient-elle encore de lui Saura-t-il faire la bonne chose avec elle pour la ramener chez ses grands-parents, en sécurité, loin de cette ville folle qu'est Moscou ?

Il ne sait pas trop où la loger pour l'instant. Il vit à la caserne, aucun enfant n'y sera bienvenue, quant à l'hôtel ce serait étrange qu'elle soit seule ou qu'il lui tienne compagnie. Ne reste que la maison familiale… bonjour les railleries. Le fils décevant qui ramène une petite miséreuse ET son chien.

Il doit aussi vite que possible lui trouver un train, la ramener chez ses grands-parents et rentrer. Le milicien pourra sans regret prend des jours de congé avec sa jambe blessée par balle qui l'empêche d'aller sur le terrain.

Tout d'abord, il doit se renseigner sur l'état de la fillette, ne pas faire des plans sur la comète.

Asimède, c'est ce qu'elle a dit, bien sûr ! Mais Anoushka hocha sagement la tête aux mots de Monsieur Bounine. Avant de se tortiller avec une moue. "J'sais pas trop, ils ont pas beaucoup beaucoup. Mais mon Andrei m'append beaucoup !"

Maksim pose sa main sur le haut de la tête d'Anoushka.
"Qui sait, peut-être que quand tu seras plus grande, une personne financera tes études pour eux, dit Max sans préciser qu'il pense à lui-même. "Il te faudra bien travailler. Et je devrais te confier une lettre pour ton retour et..."
L'idée de revoir la petite famille si accueillante lui plaisait. Surtout que ce sera plus naturel de leur prêter de l'argent.
"Et j'ai bien envie de t'accompagner à Saint-Champs. Il y a longtemps que je n'y suis pas allé."

Anoushka leva de grands yeux étonnés vers Monsieur Bounine. "Qui ?!" Elle ne voyait vraiment pas ! Peut-être les parents de son Andrei, mais ils ne l'aimaient pas trop trop car elle courrait toujours dans tous les sens et parlait fort. Mais en même temps, ils la laissaient traîner avec son Andrei et l'emmenaient souvent en spectacle et... "Vous allez v'nir ?!!!" Sa voix vrilla l'air alors qu'elle bondissait sans pouvoir s'en empêcher.

Un acouphène plus tard, Maksim lance un regard désapprobation.
"Tu es excitée mais il ne faut pas crier aussi fort. Notre pilote ne voulait peut-être pas autant de bruits pour un tour. Veux-tu bien t'excuser auprès de lui ?
- Ça va, je suis à moitié sourd déjà.
- Oh bien. Anou, je viendrais à condition que tu exprimes ta joie de façon plus mesuré. Essaye de crier ta joie un peu moins fort, d'accord ? Essaye."

Et voilà, Monsieur Bounine disait maintenant comme les parents de son Andrei. Cela arrivait toujours avec les adultes ! Peut-être qu'il ne voudrait plus venir si elle n'arrivait pas à rester calme ?!! Anoushka ferma résolument la bouche, se concentrant si fort qu'elle en oublia peut-être un peu de respirer...

L'excitation n'était pas retombée malgré tous ses efforts. Elle sautillait toujours sur place, beaucoup trop heureuse que Monsieur Bounine veuille revenir à Saint-Champs avec elle. Alors Anoushka ouvrit la bouche pour exprimer sa joie, comme il lui demandait : "AAAH !!" Premier essai : échec. Elle claqua à nouveau des lèvres dans une moue contrite et se concentra pour articuler plus doucement : "Aaaah... !!"

"Voilà, c'est bien comme ça.
- Je vous dépose là si vous avez fini, dit leur pilote.
- Qu'est-ce que tu voulais faire ensuite ? Rentrer ?"

Déjà ?? Mais elle n'avait même pas pu profiter du bateau, tellement elle était occupée à tout autre chose !! Le visage d'Anoushka tomba de déception mais elle se mordit les lèvres pour ne rien dire. Elle avait déjà fait assez d'esclandre comme ça ! Si elle continuait, Monsieur Bounine ne voudra plus venir avec elle à la maison ! "On doit rentrer ?" demanda-t-elle donc en essayant (mal) de cacher son espoir sur une réponse négative.

"Qu'est-ce que tu VEUX faire ? demande Maksim, encore assez patient pour ne pas retrouver son humeur irritée habituelle. Si je te pose la question, c'est que tu peux répondre ce que tu veux."
Autant donner des ordres directs si on ne tolère qu'une seule réponse. Cette manière hypocrite de faire l'irrite beaucoup.

Ses yeux pétillèrent de joie. "Ze veux pas rentrer, moi, M'sieur Bounine." Elle fit cependant une moue inquiète. "Mais j'veux pas non plus que M'sieur Bounine est fatigué, ou fâché."

"Mais non. Est-ce que c'est possible de rester encore un peu, monsieur ?" demande Maksim en sortant quelques pièces.
Le batelier accepte avec assez d'indifférence.
"Profite bien cette fois." dit-il à Anoushka qui passe plus de temps à jacasser et sautiller que profiter de la balade.

Un sourire éclatant revint illuminer le visage de la fillette qui s'accrocha avec toute l'ampleur de son bonheur - très fortement - à la main de Monsieur Bounine. Alors qu'elle s'intéressait (enfin) au bateau, sa curiosité revint au galop. Anoushka se tourna vers l'adulte à ses côtés qui avait déjà démontré en savoir beaucoup sur les bateaux. "La poussé d'Asimède, c'est ça qui fait tenir l'bateau sur l'eau même sans moteur ? Et donc, si moi j'vais dans l'eau, aussi je tiens sans bat' des jambes ?" Elle fit une pause songeuse. "J'sais pas nager mais on m'a dit de bat' des jambes pour pas couler. Et c'est quoi hémétique ?"

"Tu ne sais pas encore nager ?! Il faut t'apprendre ! Tu as tellement la bougeotte, près d'un fleuve ou d'une rivière il faut que tu saches au moins rester en surface. On en reparle après le bateau, d'accord ? Observe comme le bateau bouge. Je te dis pour "hermétique" après aussi."
L'embarcation glisse lentement sur le fleuve. Max reste silencieux pendant tout ce temps, se contentant d'être à côté d'Anoushka (et l'empêcher de se jeter à l'eau pour vérifier).

"C'est comme l'bateau alors ?" Bien sûr ! Vu que Monsieur Bounine lui demandait de l'observer ! Anoushka laissa ses yeux dériver de partout sur le bateau avec toute son attention... mais celle-ci restait capricieuse ! Son regard se fixa soudainement sur la rive d'en face où se dressait la devanture d'une boulangerie de luxe où elle discernait ce qu'Andrei avait appelé des gaufres et ces bâtons avec du sucre fondu au bout, les fameuses sucettes ! Son ventre se mit à gronder d'envie. Elle n'y avait jamais goûté mais, de fil en aiguilles, voilà qu'elle pensait au pain perdu de sa Baboula !

Maksim remarque la distraction de la petite fille. Il lui tapote le front.
"Plutôt que les sucettes et les gaufres, observe bien le bateau et le mouvement de l'eau."
Si elle ne change pas très vite son attrait pour les bonbons, elle ne deviendra pas pilote. Heureusement que cette attitude ne dure pas longtemps... en général.

Une moue déçue fronça son nez. Elle n'en avait juste jamais vu ! (Et puis, elle a faim aussi...) Mais elle n'avait jamais vu de bateau. Sauf qu'il y avait un petit souci dans ce que Monsieur Bounine demandait. "Je peux me pencher ?" Anoushka essayait d'être sage et de ne pas s'appuyer par-dessus la... euh... la barre. Mais c'est difficile de voir le mouvement du bateau sur l'eau sans regarder par-dessus !

"D'accord !" répondit facilement Anoushka - qui s'attendait à lui voir refuser la demande, vu qu'elle ne savait pas nager et que Monsieur Bounine devait avoir peur qu'elle tombe dans l'eau, mais Monsieur Bounine c'était le meilleur, il savait toujours quoi faire (mais bon seulement après son Andrei, bien évidemment !). Elle attrapa aussitôt la main de l'adulte et se pencha dans un élan si enthousiaste qu'elle manqua de choir par-dessus bord ! Mais elle n'y fit même pas attention. "Waouh !! Le bateau, il sépagre l'eau en deux !!"

"Le bateau va pas assez profond." acquiesça Anoushka avec toute la sagesse d'une enfant. "Et Asimède l'aide à flotter quand même. J'ai compis." Elle se tortilla pour fixer son regard sur l'arrière où l'eau était agitée de bulles. "Ya un moteur aussi sur l'bateaux, M'sieur Bounine ?"

"Oui, il permet au bateau d'avancer sur l'eau. Les canards font pareil. Tu as dû en voir chez toi, non ? C'est très courant là-bas."
Ici, les oiseaux évitent de se poser dans la zone urbaine à cause des anti-zootropes.
"Tu comprendras mieux quand je t'aiderai à nager."
La théorie c'est mignon mais rien ne vaut la pratique.

"Mais y fait froid. Faut pas aller dans l'eau, sinon on tombe malade." Monsieur Bounine ne le savait-il pas ? "Le moteur du bateau, y avance 'vec quoi ? Et au fait, les digrigeables, c'est aussi avec Asimède qu'ils flottent dans l'air ?"

Anoushka resta un moment silencieuse à cligner des yeux en sa direction ; cela faisait une masse conséquente d'informations à assimiler. Ce fut donc avec un train de retard qu'elle gonfla ses joues de bouderie. "J'suis toujou séyeuse 'vec l'digrigeables..." Pour sûr, la posture de ses lèvres n'aidaient en rien sa prononciation.