Plusieurs semaines se sont écoulées depuis la dernière fois que Varsha a vu Cyrus, son shaman préféré du moment. Ils s'étaient entraidés pour empêcher les Brisemorts de s'en prendre à des civils. Julio a été chassé sur l'Île des Esprits et les élèves sont retournés à l'école, aidant les nouvelles recrues du camps de Favelras à se faire leur propre chemin. Cyrus passe donc ses journées dans la pyramide et n'a pas invoqué Varsha depuis. L'esprit millénaire observe la forêt comme à son habitude jusqu'à ce que le sol lui évoque son islandais adoré : une pierre encerclée de fourmis noires.

Ça suffit ! Je ne vais pas attendre qu'il m'invoque ! Il risque d'oublier et deviendra tout fripé puis retournera à la terre. Je vais le chercher et avoir une vraie discussion avec lui ! résolue-t-elle.

Lors de leur dernière discussion, lui ne pouvait pas la comprendre. Son langage corporel était sans équivoque pourtant. L'esprit de la Pluie scruta le chemin entre la pyramide et les campus. Elle le trouve enfin et…

Révélation

Il est avec un autre esprit !

Cyrus est en route pour ses cours et comme tous les jours depuis quelques mois, il est en compagnie de Zonda devenu expert en création de barrières venteuses autour du jeune Shaman. Les trajets sont à chaque fois l'occasion de mieux connaître l'Esprit — il est un peu timide, mais quand il se lâche, Cyrus le trouve très drôle. À cet instant, ils devisent tous deux sur la clairière fleurie qui borde le camp de Nefertiri et comme elle est jolie à cette époque de l'année.

Une ombre passe sur les fleurs de la clairière, l'atmosphère s'assombrit, un air humide souffle, quelques gouttes d'eau tombent peu à peu puis une averse prend sa place.
Après cet étalage de ses pouvoirs, l'esprit aux cheveux bleus fait son entrée auprès du shaman et de "son esprit favori".
"Cyrus, dit-elle avec un sourire plus large qu'à l'accoutumée. Comment vas-tu ?"

Pourquoi tu ne m'as toujours pas invoquée, petit coquin ?

Cyrus a sourit et simplement remis sa capuche dès les premières gouttes ; immanquablement, il pense à elle. Zonda quant à lui n'a pas essayé de les chasser avec un sort ; il ne lui a pas fallu longtemps pour apprendre que Cyrus aimait la pluie.
Mais le garçon ne s'attendait pas à voir Varsha en personne. Il reste bouche-bée un instant, sa timidité revient au galop face à son idole. Il ne s'est toujours pas habitué, que voulez-vous.
Varsha, souffle-t-il. B-bien... Et toi ?

Dans la tête de Varsha c'est une tempête. Son shaman rit avec un autre esprit et invoqué en plus ! Il reconnaît lui-même sa culpabilité en bafouillant face à elle.
"Bien, excepté que nous n'avons pas encore parlé comme il se doit maintenant que le Sort de traduction est revenue. Ni avant d'ailleurs. Comment un élève de Bruxia qui l'appréciait aurait pu ne pas l'invoquer en trois-cinq ans ?

Elle est impressionnante, pas de doute là-dessus. Et ça ne va pas arranger le Shaman qui se ratatine sous nos yeux tellement il est rongé par la honte et le remord. Mais il n'a pas osé, c'est un fait. Elle est impressionnante !!! Il a envie de tomber à genoux et d'implorer son pardon. Mais il est figé sur place. Zonda n'en mène pas large non plus. Son petit chapeau.
Je, heu... J'ai... pas... osé. Bon ben ça a au moins le mérite d'être honnête. On fait ce qu'on peut.

Varsha observe Cyrus courbé comme une plante sous la pluie.
"Eh bien, ose ! La vie, ce n'est pas attendre que les orages passent, c'est apprendre à danser sous la pluie sans penser !"
Son regard glisse ensuite sur Zonda, l'esprit d'un vent de quelque part. Pourquoi se côtoient-ils en cet instant ? Est-ce souvent ? Cyrus manque-t-il de confiance en lui-même pour ne pas oser l'invoquer ? Ce serait fâcheux.

HRP:

Apprendre à danser sous la pluie... Combien de fois a-t-il eu envie de le faire ?! Littéralement, bien sûr ?! Il se frotte la tête d'un air gêné, mais il sourit. C'est vrai. C'est juste que... Je suis un peu intimidé, je dois l'admettre. Du coup... Bref, je me rattraperai, c'est promis ! Il jette un petit coup d'œil à Zonda qui a l'air tout aussi intimidé, comme gagné par l'état émotionnel de Cyrus. Et sans doute parce qu'il commence à comprendre jusqu'où va l'amour du garçon pour la pluie. Je vais en cours, tu nous accompagnes ? demande le Shaman à Varsha.

Varsha sourit. Le garçon ne lui avait pas encore fourni d'explications concrètes sur le pourquoi de sa mise à l'écart mais il lui proposait de passer du temps avec elle. Voilà qui lui éviterait de s'imposer.
"C'est une bonne idée : allons en cours ! J'espère que ça se passera en extérieur, ou alors un cours bien ennuyeux. Les élèves pourront regarder la pluie tomber pendant qu'ils s'endormiront ! De quel cours s'agit-il ?"

Cyrus réprime un sentiment de joie en songeant que non, pas d'extérieur pour lui aujourd'hui. Et pas de Domino (ça aussi c'est cool). Ce matin, c'est botanique et Administration. J'avoue que je préfèrerais regarder la pluie tomber. Il glousse comme un enfant. Et cet aprem, j'ai chimie. Ça, ça va être trop intéressant ! Emporté par l'enthousiasme du Shaman, Zonda applaudit en silence, ses petites mains formant comme deux petits nuages qui s'entrechoquent en rebondissant.

"Botanique, j'aime beaucoup ce cours ! Et chimie est pas mal aussi. Ça ça a l'air de te plaire. Eh bien, allons-y !"
Elle observe en silence le petit esprit Zonda qui a l'air tout heureux à côté de son shaman.

Oui, la chimie, c'est ma matière préférée. J'aimerais bien être chimiste, dit Cyrus en se remettant en marche. Il a une petite hésitation, à peine discernable. Mais Zonda, qui le côtoie depuis quelques temps déjà, l'encourage d'un petit vent chaud. Je, heu... J'adore les labo aseptisés, en fait... Mais il n'arrive pas aller plus loin dans la confidence.

"Aseptisé ? Qu'est-ce que cela veut dire ?" demande l'Esprit qui n'a pas du tout entendu parler de cette nouvelle notion qui obsède les personnes fragiles et le personnel de santé depuis tout juste un siècle, rien pour un esprit de neuf millénaires.

Ça veut dire que le lieu est lavé de tout germe infectieux et qu'il est protéger de toute introduction extérieure. En gros, ça sert à contrôler les échanges chimiques, par exemple, sans exposition à un facteur externe qui fausse les expériences. Zonda dodeline de la tête en regardant Varsha avec curiosité. Il se demande ce qu'elle va en penser. En dehors des phobies de Cyrus, il ne comprend pas non plus ce besoin qu'ont parfois les humains pour ces lieux confinés.

L'esprit clignote des yeux, l'air de ne pas comprendre.
"Les germes ? … Tu veux parler… des graines ?"

Non, c'est un élément microscopique qui, en se développant, produit un organisme. Comme une bactérie, un spore... ou même un œuf ! explique Cyrus dont l'aplomb soudain montre à quel point il est à l'aise avec ce sujet. On les associe souvent à des nuisibles, mais ce sont juste des micro-organismes. Si on empêche leur intrusion aléatoire dans un laboratoire, c'est parce qu'en s'incrustant dans une expérience, ils en faussent les résultats et invalident les conclusions d'une recherche.

Varsha ne comprend pas mieux. Les discussions philosophiques et les concepts nouveaux ne sont pas sa tasse de thé. d'habitude, elle discute jardinage, légendes, voire magie avec ses shamans, pas "aseptisé".
"Mais... les expériences chimiques marchent dehors, avec les bactéries et les œufs minuscules. C'est important, sans ça il n'y aurait jamais eu de vie. Nous faisons partie d'un tout."

En effet, concède Cyrus, toujours dans son élément. Mais parfois, pour comprendre un mécanisme, on a besoin de l'isoler. Ainsi, on comprend également comme il fonctionne dans son milieu naturel. Tu vois ? Et tout à coup, il se rend compte qu'il papote avec elle comme s'ils se parlaient depuis toujours. Ça lui fait un petit choc qu'il s'efforce de masquer. À ses côtés, Zonda a un petit sourire amusé. En croisant son regard, l'Esprit se permet même un petit haussement de sourcil et un sourire en coin.

"Oui, je vois très bien. Je vois très bien les dangers de l'abus d'une telle méthode ! Les phénomènes ne peuvent pas s'isoler sans s'altérer, ils sont tous liés les uns aux autres même si les humains pensent passer outre. C'est très bien d'analyser les choses mais ressentir c'est important aussi. J'espère que tu en as conscience."
L'échange de regards entre son shaman et l'autre esprit ne lui échappe pas.

Cyrus reste silencieux quelques secondes. C'est... vrai. Mais les humains ne ressentent pas suffisamment bien les choses pour comprendre sans expérimenter. C'est comme ça qu'on apprend. Ceci dit j'ai conscience que ce n'est pas la seule façon d'apprendre, oui, conclue-t-il. Il se sent minuscule, face à elle. Il commence à se demander s'il la déçoit et ça le terrifie. Zonda lui envoie un petit air chaud dans le dos, pour l'encourager.

Varsha perd son air paniquée pour retrouver son air tranquille et bienheureux habituel.
"Tu me montreras ça alors. Si tu aimes ça alors ce doit être bien aussi. J'ai beaucoup à apprendre des humains et vice-versa."
Toutefois, il reste dur pour l'esprit de se confiner entre quatre murs. Elle le tolère quand elle est invoquée par les débutants mais guère longtemps. Comme si faire pleuvoir se faisait sous un toit !
L'entrée de la pyramide se rapproche !

Cyrus se détend à nouveau. Mais au fond de lui, une petite voix hurle qu'il n'a pas dit toute la vérité. Enfin pas tout à fait. Il s'arrête à quelques mètres de l'entrée afin de rester à l'écart du flux d'élèves qui entre et sort, ou squatte juste devant. Pas besoin d'être l'Esprit de l'Hésitation pour voir qu'il hésite. Zonda, à nouveau, l'encourage d'un courant d'air... Avant de regarder Varsha par en dessous, comme s'il était en faute. Alors qu'il est juste très intimidé lui aussi.

Varsha flotte gaiement jusqu'à la pyramide. Son shaman ne dit rien et reste bien calme comparé à son excitation lors de leur rencontre.
"J'aime beaucoup l'Islande, c'est beau là-bas. Tu n'y as pas passé beaucoup de temps, tu m'as dit alors que tu en es originaire. Tu n'as jamais eu envie d'aller y faire un tour ? Ou un autre coin de globe."

En fait, c'est surtout que mes deux parents sont Shamans, donc j'ai grandi ici, explique Cyrus, en se remémorant sa première rencontre avec Varsha et leur discussion incomplète faute d'être à double sens. J'y ai passé du temps pendant les vacances, par contre. Chez mes grands-parents. Et j'aime beaucoup aussi, ajoute-t-il avec un sourire, heureux qu'elle apprécie son pays. J'avoue en revanche que je n'ai jamais vraiment songé aux voyages... Pourtant, je crois que j'ai bien aimé le Brésil. Enfin les gens, surtout, dit-il avec une pensée ému pour la famille de Cruz qui l'a accueilli à bras ouverts.

"J'aime beaucoup le Brésil aussi, les villes sont colorées."
Elle aime particulièrement les surprendre pendant une fête ou un festivale, les décorations sont très jolies mais malheureusement ils arrêtent dès qu'elle se lâche.