La capital est un point de rencontre immanquable ! Le dragon-fée Fotafilis ne manque pas d'y passer régulièrement. L'endroit lui permet de rencontrer des confrères marabouts, de trouver des potions rares décoquetés par des alchimistes renommés, d'y trouver des livres sur tous les sujets et surtout d'y trouver beaucoup de clients.

L'agitation lui rappelle le temps lointain où il appartenait à une colonie. Déjà à l'époque, le jeune Fil aimait observer le guérisseur s'occuper des blessés et des souffrants. À présent, c'est lui qui s'en occupe. Il a plusieurs moyens à sa disposition. Il peut administrer des médicaments et des anti-douleurs, recoudre avec précision, masser des points précis, étudier l'intérieur de l'œil avec une luciole pour lumière, et cetera. mais aussi dans les cas les plus graves : recourir à la magie blanche.

Le dragon-fée a eu l'extrême honneur de prendre ses leçons auprès d'un elfe de la citée de Lalalariel après avoir aidé un dragon centenaire à rétablir l'équilibre d'une forêt. Il n'en dira rien au premier venu, il reste très modeste. Aussi modeste que sa taille de colibri blanc, ce qui l'oblige à se manifester par une pancarte.

Un aventurier se présente à la taverne bondée. Il est recouvert de tâches noires qui effraient les autres usagers car il s'agit de magie noire. Le frêle marabout se concentre et use de sa magie blanche pour le guérir.

Attablé dans la taverne, un - ou une ? - Elfe, parmi tant d'autres ici, regarde avec intérêt l'arrivée d'un patient peu ordinaire, et l'autoproclamé marabout qui se charge de son cas. Ses yeux rouges dérivent sur la pancarte qui annonce le guérisseur et ses lèvres se parent d'un sourire. La joue appuyée contre ses doigts repliés, l'elfe reporte son attention sur le soin. Le malheureux a l'air de beaucoup souffrir...

Le maléfice dont est victime le guerrier résiste. Le dragon-fée entend presque la voix de Jëawel lui expliquer comment marche les flux de magie noire à contrer. Détourner cette énergie vers une autre cible, lui opposer une magie blanche équivalente dans le pire des cas. Peu à peu les marques noires reculent. Le petit corps de l'être féérique a du mal face à une si grande étendue.

Le visage de l'elfe se fend d'une grimace en voyant les forces qui s'opposent. Magie blanche contre magie noire... Mais le dragon-fée, bien plus solide qu'il n'y paraît au départ, parvient finalement à vaincre le maléfice, le laissant, lui et son patient, à bout de forces. Cela semble le bon moment pour intervenir. L'elfe se lève et commande assez de thé pour trois. Elle attrape sa chaise pour venir s'assoir à côté du minuscule guérisseur et tend son propre verre d'hydromel, intact, à la créature.

Quelque chose me dit que tu as besoin d'un remontant.

Fotafilis a toujours privilégié les méthodes non-magiques pour soigner qu'il juge plus saines. La magie parait extraordinaire aux autres parce qu'ils en ignorent le coût. Mais le plus important est fait : le maléfice de l'aventurier a quitté son corps. Celui-ci a l'œil plus vif. Un humanoïde tend un verre au marabout. en quel honneur ?
"Merci... Cherchez-vous à me demander un service ?"
Difficile à dire avec les humanoïdes, celui-ci est un elfe, peut-être même une elfe.

La question dessine un grand sourire sur le visage fin. Les miens viennent toujours te voir de manière intéressée ?

Le ton se veut presque choqué, mais elle ne dément pas sur ses propres intentions.

Pour le moment repose-toi, et si tu as faim, c'est moi qui régale.

Une théière est posée sur leur table, accompagnée de trois tasses. Un clin d'œil fait fuir la serveuse et rire l'elfe. Si tu préfères du thé à l'alcool... Elle tend la première tasse à l'ancien maudit, qui la regarde avec des yeux ronds. Visiblement le dragon-fée n'est pas le seul à trouver cette compagnie étrange. Elle rit encore. Eh bien ? Je ne mords pas !

Le ton choquée de l'elfe n'émeut pas vraiment le dragon-fée bien trop terre-à-terre. Depuis deux ans qu'il parcourt cette terre, il commence à bien connaître les humanoïdes.
"C'est tout à votre honneur mais je ne bois pas d'hydromel, je préfère le jus de fruits. L'alcool risque de m'exploser l'estomac."
Sa dernière cuite à la bière lui a laissé un mauvais souvenir.

Malgré son hésitation, l'humain avait fini par prendre la tasse.

... pas au sens littéral j'espère ?

La jeune elfe, serviable, servit une seconde tasse pour la placer cette fois devant le guérisseur. Il y avait sans doute plus de thé que de dragon-fée.

Le thé devrait te convenir dans ce cas ? Elle continua sur un sourire mutin. A moins que tu ne préfères un jus de fruits ?

L'aventurier se servit également du thé ainsi offert, les yeux toujours rivés sur cette elfe qui n'a pas encore livré la raison de sa courtoisie. Il semble de meilleur état que tout à l'heure, ce qui rasure son marabout.
"Le thé ira très bien, je vous en remercies."

Tant mieux.

Joviale, l'elfe vida le godet d'hydromel cul-sec, avant de remplir pour elle-même la troisième et dernière tasse de thé. Ses yeux brillaient d'une lueur malicieuse, comme si elle s'apprêtait à lancer une plaisanterie à une vieille connaissance.

Mes félicitations pour ce tour de force maître Fotafilis.

Fotafilis est d'abord surpris d'entendre son nom alors qu'il ne s'est même pas présenté. Puis il réfléchit et réalise que son nom est inscrit en gros sur sa pancarte.
"Et à qui ai-je l'honneur ?"
Le dragon-fée ne sait toujours pas ce que lui veut l'inconnue.

Après avoir bu un peu de thé, la jeune femme ouvrit la bouche et afficha un air contrit par-dessus sa tasse.

Quelle incorrection de ma part... !

Elle posa sa tasse et reprit bien vite ses aises, appuyant joyeusement son visage sur sa main.

Sélène. Elle tourna le regard vers le voyageur resté silencieux, terminant le tour de présentation sur le ton de la conversation. Et toi ?

Sélène ne dit strictement rien à Fotafilis, c'est une inconnue qu'il a devant lui. Il a pourtant une sensation de déjà vu.
"Masroth, c'est mon nom, répond le voyageur avec un air presque impénétrable pour le dragon-fée.
Les émotions ne sont pas son fort.

Enchantée Masroth. Elle lui tendit la main d'un air enjoué, semblant oublier, elle aussi, la raison de sa venue. Comment as-tu attrapé cette malédiction ? C'était une malédiction n'est-ce pas ? Elle s'était tournée un instant vers le dragon-fée, demandant implicitement une confirmation, avant de revenir sur l'elfe. Comment te sens-tu maintenant ?

"Eh bien, j'étais dans les Monts de Krokdor quand c'est arrivé. Un assassin y a établi son repère là-bas et je voulais lui tendre un piège pour tirer un bon prix sur sa tête en somme. Mais je pensais avoir affaire à des talents physiques, pas magiques. J'ai tout juste eu le temps de voir qu'il s'agissait d'un elfe noir."
Ensuite il avait simplement couru à la capitale, la queue entre les jambes.

Un mage elfe noir... Un bref air pensif précéda une petite grimace. Vraiment pas de chance... Heureusement tu as pu arriver ici à temps. Avec un léger sourire, elle poussa le verre d'alcool vers l'infortuné aventurier. Finalement, c'est peut-être toi, qui en a besoin.

L'aventurier ne se gêne pas pour prendre l'alcool. Ses yeux s'arrêtent un instant dans le regard de l'elfe.
"Bon, eh bien puisque l'on n'a plus besoin de moi, je vais me retirer," dit Fotafilis avec détachement.

Soudain alarmée, l'elfe se tourna vers le guérisseur. Je ne voulais pas t'ignorer... Elle regarda l'humain, puis le dragon-fée. Elle se frotta la tempe, manifestement embarrassée. Je me laisse distraire... Puis vers le médecin, qu'elle avait interpelé au départ. Acceptes-tu d'entendre ma requête ?

Fotafilis n'avait nullement insinué que l'elfe l'ignorait bien que l'on puisse en avoir l'impression d'un point de vu extérieur. Le dragon-fée en avait juste conclu que la curieuse elfe était passée à autre chose. Mais celle-ci a bien une requête à lui poser.
"Faîtes donc, dame elfe," dit-il sans lâcher son vouvoiement.

L'elfe semblait faire son possible pour reprendre contenance, et aussi, mettre de l'ordre dans ses idées. Ca va paraître abrupte, peut-être... Son doigt pointa sa joue, mais elle n'hésita pas longtemps. J'aimerais que tu m'apprennes la médecine.

Une méthode abrupte qu'aime bien Fil. Aller droit à l'essentiel est aussi une forme de politesse, ne pas happer quelqu'un et lui tenir la jambe pendant plusieurs minutes et l'assommer de bavardages est un bon sacrifice.
"Bien sûr, contre rétribution, alimentaire ou corvée, je ne vois pas le problème."
Former des concurrents ne fait pas peur à Fotafilis, il y aura toujours assez de bras cassés et de malédictions pour tous les guérisseurs de la terre.

Magnifique ! L'euphorie de l'elfe dénotait clairement qu'elle craignait un refus, quelle qu'en soit la raison. Elle se calma rapidement, pour reprendre une conversation plus raisonnable. J'ai quelques connaissances... basiques, et je veux faire plus, être capable de plus... Tu connais la chirurgie ? Son enthousiasme était toujours bien présent.

"Je connais la chirurgie. Je vous demanderais de bien vouloir me vouvoyer et ensuite de me dire pour quelles raisons vous souhaitez devenir guérisseuse ou marabout, madame ?"
La nuance entre les deux n'intéresse pas Fotafilis. si le marabout soigne toutes les créatures, des elfes bien-nés aux orcs barbares, le guérisseur se contente des "bonnes" gens.

Je... oh. La demande du guérisseur coupa son élan, mais elle baissa légèrement les yeux. Je n'y ai jamais fait attention, mais c'est un moindre prix à payer... Elle releva le visage, tout sourire. Quelle est la différence entre un marabout et un guérisseur ? Je ne suis pas sûre de saisir.

"Le guérisseur soigne les races qui n'ont pas traversé la Brèche, le marabout soigne toutes les races sans distinction et... le nécromant draine la vie au prix d'un effort coûteux, je ne fais pas cela."
L'aventurier hoche la tête.
"Ah ça, ces nécromants !"