"Comme tu veux." Il a son habituelle intonation vaguement triste, tristement neutre mais va s'asseoir sur le lit à côté d'elle, l'écoutant parler d'un ton plein d'amertume et de réprimande. Visiblement, elle n'a pas comprit que c'était ce qu'il pouvait lui arriver de mieux. Il ne se voit pas le lui expliquer mieux que le Capitaine, alors il décide de faire comme s'il n'avait pas entendu le sous-texte et de se concentrer sur ce qui est dit. Plus simple.

Je le suis du regard. Ca au moins... ça a pas changé. J'arrive à sortir un petit sourire triste. "Va pour Syl ?" Je me demande si je serai comme lui après quelques années à être un point sur un écran.

Il hoche la tête, les mains posés à plat sur le matelas. Et il attend. Si elle a d'autres choses à dire, elle le dira, c'est comme ça qu'elle est. Elle DIT les choses. Pas toujours des choses vraies. Et pas toutes les choses. Mais ça, il s'en fiche, lui. Il ne recherche pas la Vérité. Il attend simplement.

Je souris un peu plus sincèrement. C'est toujours ça. "J'suis désolée. J'suis à cran. Tu m'en veux pas ?" Ca doit être genre la première fois de ma vie que je m'excuse deux fois en moins d'une minute. Je me suis même pas forcée. C'est pas normal. Je me demande s'il a capté. Je secoue la tête pour me remettre les idées en ordre. "C'est quoi le programme alors ?" Non, ça il va pas capter cocotte. "On part quand ? On va où ? On fait quoi ? C'est quoi mon rôle ?"

Il secoue la tête. Il ne lui en veut pas. Pour lui montrer à quel point il ne lui en veut pas, il pose même sa main sur sa tête et lui ébouriffe la tignasse avant de récupérer ses doigts pour les mettre exactement au même endroit qu'auparavant. "Je ne sais pas." C'est vrai. Lui aussi attend les ordres. Lui aussi est un peu perdu par tout ça. Il n'a pas spécialement envie de repartir. La Ruche, c'est quand même chez lui.

"Eeeeh !" je proteste comme une gamine qui se fait ébouriffer les cheveux par son grand frère. Avant de capter, en les remettant en ordre, qu'il a jamais fait ça. Jamais. Je me fige une seconde, les bras en l'air, avant de recommencer à lisser mes cheveux plus calmement. Il prend des initiatives. Mais il sait pas ce qu'il doit faire pour la suite. Je le fixe. "Tu aurais une idée de ce que je dois savoir et qu'on m'a pas dit ?"

Il secoue la tête encore une fois, réfléchissant en même temps. Le Commandant lui a tout dit, pour autant qu'il sache. On peut avoir confiance en lui. Même s'il peut effrayer avec son armure et son ton parfois sévère, c'est quelqu'un qui a le bien être de ses subordonnés à coeur. Et Sara, quelque part, elle est en train de devenir subordonnée à lui. "Pour commencer, retrouver le vaisseau et les traces autour des armes."

"Ca je dois pouvoir faire, retrouver l'emplacement de l'atterrissage. A pied. Si le vaisseau est encore là en tout cas." Je pense soudain à un truc. "Tu as gardé les autres affaires que tu as trouvées quand tu as récupéré mon armure ? Il y avait deux semi-autos... je sais plus quel modèle... ils faisaient partie de la cargaison. Ca pourrait aider à tracer le reste si jamais ça a disparu ?"

Il hoche la tête, fouillant tranquillement dans le sac qui sert à transporter le matériel pour en sortir un traceur d'éléments et l'un des deux semi-automatiques. L'autre, il l'a rentré dans son rapport, en preuve mais il s'est aussi dit qu'un modèle pouvait servir, ne serait-ce que pour avoir les numéro de série. Pour lui prouver sa bonne foi, il le lui tend d'ailleurs. Même si elle le tue avec, elle ne pourrait pas aller bien loin alors ce n'est pas un gros risque.

Je prends le machin, je le retourne. Vu le poids, il est chargé. Ca doit être celui que je portais moi, pas celui ide Ryot. "Ouais, c'était ça." Je capte soudain qu'il me file un truc chargé alors que je suis seule avec lui. Ca pue l'Epreuve. Ben raté. Maintenant que je suis pucée, j'ai plus aucun intérêt à prendre un otage, et je suis pas désespérée au point de te tuer. Je scrute le machin qu'il a gardé en main. "T'as déjà cherché de l'info, j'imagine."

"Non." Le commandant à l'air d'espérer qu'ils le fassent ensemble, alors il n'a rien fait sans elle. Il ne veut pas lui causer plus de préjudice qu'il ne l'a déjà fait. Même s'il sait au fond qu'il n'est pas responsable, la vie d'esclave aurait été bien pire. Il soupire et se lève. "Vient ?"

Je soupire aussi, je me lève et je lui tends le machin. "On va où ?"

Il range le capteur, regarde un moment le semi-automatique sans comprendre puis le range lui-aussi dans le sac. Il hausse les épaules. "Où tu avais tes affaires. Nous pourrons remonter de là." Il a une hésitation. "Si tu es en état."

"Retourner en ville donc..." Je hausse les épaules - enfin j'essaie, c'est encore un peu insensible. "Ca ira. Tant que tu m'obliges pas à revoir une boîte de conserve avant... quelques années ?" De l'acide, encore. "Bref. J'ai le droit de taper des gens si je les reconnais, ou la bienveillance de l'AAG s'arrête à la contrebande ?"

"Taper ?" Il ne comprend pas pourquoi elle parle de taper. Il a saisi son amertume face au Commandant. Il y a un passé là dedans qui ne le regarde pas. Il a comprit aussi qu'elle se fichait d'aller en ville mais le verbe "taper", il n'arrive pas à savoir s'il s'agit d'un sens premier ou argotique.

"Le Capitaine d'arme s'occupe des marchands mais si l'on croise une bande rivale qui a pris en contrebande votre marchandise, il est possible que nous retrouvions à devoir nous défendre." Ce qui veux dire que oui, si elle a envie de taper, il lui trouvera de quoi taper sans la mettre en porte-à-faux auprès de l'AAG. Même s'il sait qu'avec son tir à lui, le corps à corps n'est en général pas d'actualité, il note par lui-même de lui laisser un ou deux ennemis, au besoin. Elle a l'air d'en avoir besoin.

Oh. Il réfléchit. Ses affaires. Euh. Il ne se souvient pas avoir rapatrié autant d'affaires pour dire le vrai, cette convocation sur la Ruche ayant été assez incongrue. Il note intérieurement d'aller les rechercher avant le départ, et de repousser ledit départ au lendemain. On ne savait jamais les réactions à une anesthésie, même locale et il préférait encore partir avec une Sara bien réveillée. "Alors, nous partons demain."

Je le regarde réfléchir et je hoche la tête. "D'accord. Demain." Et puis ? "En attendant c'est quoi le programme ? T'as des trucs à faire ? A m'expliquer pour demain ?" Tu voudrais bien ne pas me laisser toute seule avec le plafond et mon traceur s'il te plaît ?

"Pour toi, repos, repas. Pour moi, organisation du programme, rassemblement du matériel, proposition du protocole prévu de mission à mon officier supérieur." Il est toujours assit sur le lit, il ne bouge pas, il regarde mélancoliquement le plafond, réfléchissant. "Combien de personnes nécessite cette mission d'après toi ?" Elle est la mieux placée pour avoir une idée, même vague, du nombre d'hostiles, normalement.

"Un ingénieur mécano, un démineur" pour réparer le vaisseau, au cas où les caisses d'armes se seraient abîmées, ou si quelqu'un les a piégées, ou encore pour déloger un camp légèrement fortifié "deux soldats" entendez, spécialisés dans le corps à corps. Il se débrouille évidemment mais il reste un tireur dans l'âme. "Un tireur, toi, moi. Sept personnes." Il réfléchit un moment aux camarades qu'il pourra demander au Capitaine. "Combien de temps d'ici au vaisseau ? A pied ?"