Rappel du premier message :





Pourquoi lui ?

Le soulagement. La confiance. La victoire sur le concept si populaire de "destin".

Pourquoi lui ?

La rencontre future avec une autre amie. Une "semblable". Qui lui aurait fourni les clés pour accéder une maîtrise de son pouvoir qu'il n'avait jamais pu développer auparavant, autre que dans un étang caché loin de sa ville natale ou dans sa baignoire étatsunienne.

Pourquoi lui ?

Des bruits dans son immeuble. Des rumeurs. Des personnes en uniforme.

Son nom.

Une situation qui lui a fait tellement regretter les moments où il n'avait été que paranoïaque.
La fuite avant le soir.
Pas dans la nature. Non. Les satellites observent. Ce serait la mort assurée.
Chez Takashi. Oui. L'ami de sa tante. Comme un père pour lui.
Mais peut-être qu'il se tromperait. Ils le retrouveraient, et les tueraient tous les deux. Avoir ça sur la conscience ? Jamais.
C'était peut-être affreusement stupide.
Mais il n'avait rien trouvé de mieux.
Il n'arrivait pas à bien raisonner.

Pourquoi lui ?
Pourquoi lui ?
Pourquoi lui ?

Se demandait-il dans sa baignoire.

Pourquoi était-il né "mutant" ?



Et surtout :



Comment l'avaient-ils su ?

Shunsuke ne put réprimer un sourire en voyant la pose décidée de Harriet, et ému des risques qu'elle était prête à prendre pour quelqu'un ne faisant même pas partie de sa famille. Fermant les yeux et observant le sol blanc de l'intérieur de la douche et les innombrables gouttes d'eau qui s'y fracassaient, il finit par dire : Une fois qu'on sera partis, on ne pourra probablement pas faire marche arrière. Tu es bien sûre de ta décision ?

Shunsuke soupira en souriant. Yoshi (fair enough). On y va ensemble. À la question de Harriet, il fronça les sourcils d'incompréhension. Je voulais dire que je pensais rester à l'écart un moment avant d'aller voir qui je dois aller voir. Mais maintenant qu'on est deux, les choses sont différentes. Après une dizaine de secondes, il inspira, expira. Puis il éteint la douche, se levant lentement pour ensuite se tenir droit. Je prépare vite mes bagages. Je n'ai pas beaucoup à emballer.

Shunsuke ne mit pas cinq minutes mais un quart d'heure. Deux minutes pour garder autant que possible la sensation qu'il avait éprouvée tout en étant sous la cascade d'eau apaisante de la douche, neuf pour faire ses bagages, deux pour contempler la chambre qu'il avait longtemps occupée chez Takashi avant de prendre son propre appartement.

Il inspira, puis expira. Et sortit.

Muni d'un sac à dos, il le déposa devant la salle de bain.

Il faut que je me teigne les cheveux. Je fais aussi vite que possible, dit-il, tentant de maîtriser sa nervosité peu à peu recrudescente.

Shunsuke acquiesça silencieusement, et parvint à atteindre un certain état de détente tandis que son amie lui teint les cheveux en brun et les rendit plus lisses encore qu'ils ne l'étaient déjà. Au bout d'un quart d'heure, il était prêt. Arigatô, Harriet. Takashi ne m'a jamais vu avec les cheveux blancs... Je me les étais déteints par désespoir tout à l'heure. Heureusement qu'il ne m'a pas vu. Je... Je n'ai jamais voulu l'entraîner dans... ce que je suis et ce qu'il en retourne. Il se leva et alla prendre son grand sac à dos. Ikô. (Allons-y.) Je vais dire au revoir à Takashi. Je dois trouver une bonne excuse pour mon comportement...

Regardant au sol les yeux semi-écarquillés, Shunsuke dut se rendre à l'évidence : Harriet avait raison. Les anti-mutants avaient beau croire agir pour le bien de l'humanité, qui lui disait qu'il n'y avait pas parmi eux les pires ordures, capables de torturer des innocents pour parvenir à leurs fins ? ... J'avais espéré ne pas en arriver là. Mais tu as raison. Il inspira, puis expira. Je vais lui dire. Prenant son sac à dos, il se rendit lentement dans le salon... où les y attendait Takashi, ayant lui aussi un sac à dos. Surpris et intrigué, le jeune homme dit : Oji-san... Harriet et moi... Shunsuke, l'interrompit-il calmement. Je sais.

Shunsuke et Takashi se parlaient en japonais. Tu le savais ? Ta tante m'a longtemps parlé de ton pouvoir. J'avais quand même le droit de connaître la vraie raison de ta venue, non ? ... Pourquoi ? Pourquoi tu me l'as jamais dit ? Pour la même raison que tu as pas voulu me dire pourquoi tu t'étais terré dans la salle de bain. La peur qu'il m'arrive quelque chose si j'avais connaissance de ton pouvoir. Il lui mit la main sur l'épaule. Tu as vécu suffisamment de tragédie comme ça, et tu as réussi à te faire une nouvelle vie... Je voulais pas ajouter à ton angoisse. En tout cas, JAMAIS je laisserai ces salauds fanatiques te faire du mal.

Même l'angoisse forte et la douche par lesquelles était passé Shunsuke ne lui avait rendu les yeux humides, ce qui venait de changer. Ils continuèrent de parler leur langue maternelle. Oji-san... désigna-t-il Takashi. Je... Je viens avec toi. Le jeune homme leva les yeux. Je suis peut-être un humain sans pouvoir, mais je saurai me rendre utile. Tu pourras compter sur moi à plus d'un niveau. Et tu le sais. Il lui mit la main sur l'épaule, l'émotion commençant à se refléter sur son visage à lui également. J'ai pas fait partie de ton combat toutes ces années, fiston. Permets-moi d'en faire partie maintenant. Ils se firent une étreinte.

Shunsuke se retourna vers le couloir.
Harriet-chan ? Tu peux venir ! Takashi vient avec nous !

Shunsuke prit une grande inspiration. Maintenant, on quitte cet appartement. Oji-san, prends... Les documents importants. Oui. J'ai été yakuza autrefois, mon garçon, dit-il en clignant de l'oeil. Il reste des choses importantes dans ton appartement ? Non. Je paniquais, mais pas suffisamment pour faire suffisamment attention et prendre tout ce qui était important dans mon sac. Alors en route pour l'aventure. Tu sais où aller ? Il regarda la fenêtre, pensif. Oui. Il y a une personne de confiance qui pourra nous aider. Alors c'est là qu'on se rend.