Rappel du premier message :

C'était à n'y rien comprendre : un instant, Méduzarb' tentait de résoudre une énigme dans un escape game sexuel ; la seconde d'après, elle était au sommet d'une petite butte verdoyante balayée par le vent. Les ondes de verdures le succédaient aux bosquets, ce jusqu'à un lointain horizon rose bonbon qui semblait recouvrir le ciel. Une chose était sûre, Méduzarb' se trouvait dans un endroit inconnu. Il n'existait pas de planète aussi propre dans tout Oxtros.

"Non, avant de bouger d'ici, enfin c'toi qui voit si la douleur est supportable, mais on devrait essayer de raligner ton bras et de le mettre en écharpe ."

Après c'est à elle de voir.

"Tu fais quoi là ? Et on n'est pas dans ton subconscient sinon j'y serais pas arrivé avant toi."

Méduzarb' avait lu toutes les thèses du Concile de la réalité, donc elle aurait pu continuer longtemps sur l'aspect métaphysique de ce qui leur arrivait. Cela dit, si tout cela était réel, elle risquait de mourir de septicémie avant d'avoir terminé son argumentaire.

"Okay, on fait comme tu dis."
Puis elle escalada des rochers pour atteindre une branche à arracher.

"Alors, du coup, tu viens d'où, toi ?"

"Je suis espagnole, et toi ?"

Bon dans l'idée la branche c'est pas mal, mais il faudra des bandages. Heureusement l'étoile sait quoi faire, elle arrache des morceaux de la voie lactée qui la vêt, ils reprennent illico leur apparence de lin blanc.

Méduzarb', qui passait déjà une mèche de cheveux entre ses dents pour l'arracher, fit les gros yeux en voyant Carmen s'enlever les étoiles du corps.

Euh, attendez, machine arrière toute : son corps était vêtu d'étoiles ?

"Ouah, Incroyable ! C'est un truc propre à la race des espagnoles ou vous utilisez une technologie de réduction ? Je vais pas me brûler, au moins ?" Demanda-t-elle, en s'emparant du morceau.

Spoiler : non, ça ne brûlait pas.

"Non, c'est comme ça depuis que je suis dans l'esquisse, tous mes habits prennent l'apparence du ciel de ma peau."

Elle ne pouvait plus porter du rouge, du rose, du... enfin vous avez compris, et elle trouvait ça plutôt triste. Seul Nil réussissait à la parer d'aube.

"Et ce n'est pas correct de dire que les espagnols sont une race."

Méduzarb' se fit une atèle comme elle put, mais elle dût serrer fort pour que l'os rentre complètement, ce qui ne manqua pas de la faire tourner de l'oeil.

"C'est quoi, alors ? Un sous-ordre ? Une espèce ? Un découpage administratif ? Une résonnance méta-quantique ? Je suis prête, au fait, on peut y aller, si tu veux."

"Un quoi ?"

Selon ses croyances, l'univers a été créé en sept jours, alors tout le bazar-là, ça ne lui parle pas.

"Ouai, suis-moi, je crois qu'en remontant un peu la rivière on arrivera à un pont, puis à une route qui mène au champ d'éoliennes."

Elle haussa les épaules.

Carmen avait l'air de ne pas comprendre ce dont lui parlait Luili, ce qui semblait indiquer qu'elle venait d'un monde primitif. La mention d'un champ d'éoliennes ne fit que renforcer cette croyance.

"Oh ! La seule fois où j'en ai vu, c'était dans un musée de l'énergie, étant petite."

Elles se mirent donc en route.

"Eh, dis, c'est quoi l'esquisse, dont tu parlais ?"

"Tu as déjà vu des éoliennes avant ?" elle s'étonne, elle n'a pas le souvenir d'avoir croisé des éoliennes avant d'arriver dans l'Esquisse. Il faut avouer que de tels arbres fruitiers n'existaient pas dans son monde, et le mot avait un tout autre sens... Qu'elle avait oublié.

"C'est ici l'Esquisse!"

Personne n'aurait une meilleure définition que "l'Esquisse est tout ce qui n'est pas autre que l'Esquisse." Sauf peut-être Amundsen, il faudrait qu'ils lui demandent.

Si elle avait vu des éoliennes ? Elle avait même essayé d'en construire une petite, à l'école : échec total.

"Ouais, mais ils étaient déclassés, donc ils ne produisaient plus rien."

Cela dit, la réponse de Carmen était quelque peu, insatisfaisante.

"Ah, tu veux dire que c'est un territoire géographique ? Il est voisin de l'espace des espagnol au pluriel ?"

"A priori non... Sinon ça se saurait, j'imagine."

Expliquer l'Esquisse alors que personne ne sait exactement ce que c'est (sauf peut-être Eelis et Kaoren ses grands dieux) (et peut-être Stilgar parce que Stilgar...) Alors vous dire un personnage pris au piège de l'univers et des lignes...

"On ne sait pas où on est,on sait juste que c'est dangereux."

Méduzarb' leva son bras blessé, un grand sourire aux lèvres.

"En tout cas, je peux attester que vos cailloux sont au moins aussi dangereux que les nôtres !"

Elle jeta un regard autour d'elle, visiblement fascinée.

"J'avais jamais vu un paysage aussi... Propre. On dirait presque une planète vierge. Il y a des radiations, ici ? Des pluies acides ?"

Pendant un instant, elle pensa aux mots Alpha Perdu.

La télune eut une moue d'horreur.

"Oh non ! J'ai pas envie de me faire sabler !"

Mais elle nota mentalement tous les conseils. C'était important, dans un nouveau monde. Ou quand on arrivait à un poste-frontière de l'AAG.

"On devrait peut-être ce mettre en route. Tu connais le chemin ?"

Elle ignorait comment elle allait se payer les services d'un médecin. Elle était littéralement à poil.

"Oui, s'il n'a pas décide de changer entre temps... Mais c'est moins probable que dans le labyrinthe..." dit l'étoilée en se lançant d'un pas décidé dans la prairie d'herbe bleue.

"Tu viens d'où toi du coup ? Tu te souviens comment tu es arrivée ici ?"

Ca ne coutait rien que d'essayer.

"Je viens d'une planète aquatique qui s'appelle Buu, mais j'en ai visitée bien d'autres. J'ignore comment je suis arrivée ici. J'étais sur le point de finir une escape room sexuelle quand... Je ne sais plus trop, c'était assez flou. Pendant un moment, j'ai cru que c'était mon lubrifiant synesthésique qui était périmé. Ou mon lavement. Mais là, j'y comprendre rien."

Elle mis sa main valide devant son visage.

"Les tests de réalité ne marchent même pas !"

Luili tourna vivement la tête vers Carmen.

"Quoi ? Non ! Mon esprit, okay, il était déjà altéré, mais mon discours, pas touche ! Peut-être que tu comprends pas parce que tu viens d'un monde qui n'a pas la forme d'une planète et sans reproduction sexuée, c'est tout.

Après tout, c'est la première fois que je vois de l'herbe bleue à l'état naturel. Donc soit c'est de la géo-ingénierie, soit la théorie du multivers est correcte. Ca te parle ?"

Carmen est aux abonnées absentes, elle ne comprend rien de ce que raconte la zarb, mais au lieu de se perdre dans le discours de sa comparse, elle finit par conclure que cette dernière est altérée par l'Esquisse.

"Tu ne serais pas cyantifique toi ?"

"Ouiii !" Fit-elle, enthousiaste, comme si cela résolvait la question.

"Enfin, en ce moment, je suis surtout terroriste, mais comme ça ne paye pas beaucoup, je fais parfois des petits boulots pour l'agroalimentaire. Toujours est-il que mon programme est maintenant clair :
1. Faire rentrer mon cubitus à l'intérieur de mon corps.
2. Trouver des vêtements.
3. Retourner dans mon monde d'origine."

Elle se mit à siffler une mauvaise mélodie. Ou alors elle sifflait très mal.

"Il me semblait pourtant que la mort avait toujours été un travail lucratif..."

L'ancienne espagnole rit, de bon coeur, de malheur, d'étoiles et de ténèbres, de mélancolie.

"Rentrer chez-soi, c'est ce qu'on souhaite tous ma jolie."

La dernière phrase l'interpela.

"Comment ça ? Tu n'y arrives pas ? Comment tu vis, alors ?"

En marchant, Luili écartait ses doigts de pieds pour sentir l'herbe bleue bien fraîche. C'était une sensation incroyable, et légèrement perturbante, que de marcher sur quelque chose de vivant en dehors d'un donjon SM.

"On vit comme on peut, moi je rends des services aux cyantifiques pour gagner pas couenne."

Elle répond, bien entendu à côté de la plaque, comme s'il avait pu en être autrement.

La télune hocha la tête avec un air de satisfaction, comme un professeur fier de son élève.

"Oui, c'est bien d'aider les scientifiques. S'il y a des gens capables de mettre au point un portail inter-dimensionnel, c'est bien eux. Enfin, s'ils ne vaporisent pas l'atmosphère sans le vouloir. Ou en le voulant, pour certains."