Epreuve 5 - Elysion - Le retour d'HariboDim 18 Avr 2021, 17:38
Selene
Séléné est une magicienne membre du gouvernement d'Eaque. Malgré sa puissance, elle est de plus en plus solitaire, de peur de perdre ceux qu'elle aime et absorbée par son travail.
Elysion
- Elysion en quelques mots si jamais ça vous intéresse !:
- En quelques mots, Elysion est la Terre, juste quelques milliers d'années plus tard. Une petite Pangée de plus, une poussée évolutive laissant apparaître la magie et l'abandon d'une partie de la technologie plus tard, le mélange donne une étrange science-fantasy où l'on se permet un peu tout.
L'Ombre fait partie de ces êtres inimaginables nés d'erreurs magiques, des erreurs qui, pour certains, deviennent le point de départ d'une nouvelle vie.
Durant plus d’un siècle, Elysion a lutté contre l’Ombre, et a été enfermée sur une Lune lointaine. Sauf que voilà, les emprisonnements à perpétuité ça ne va jamais vraiment jusqu'au bout, surtout quand on compte sur la magie. Après plus d’un millénaire à attendre, tous se sont libérés peu à peu, et une nouvelle guerre a déferlé sur Elysion.
Le monde d'Elysion est divisé en trois continents, chacun dirigé par un roi, une reine ou un couple royal. L'Histoire actuelle se passe sur Eaque, et plus précisément dans la capitale, Hypnos. On dans le bureau de Séléné qui travaille dans l'immense tour qu'est le palais royal où siège également tout le gouvernement.
Six ans. Six longues, très longues années, seul dans le froid d’Artgard. A attendre, encore, encore, encore, à attendre qu’elle revienne. Oh, parfois, oui, elle revenait. En coup de vent, toujours, mais elle était là. Aujourd’hui, il en avait assez. Aujourd’hui, il partait la chercher.
Séléné Saralondë cacheta une lettre rapidement, et la jeta presque dans le panier de courrier à envoyer. Ensuite, elle ouvrit d’un geste sec un tiroir, y attrapa un dossier, le posa sur son bureau de bois massif avec un claquement puis referma vivement le tiroir qui le contenait jusque là. Elle ouvrit le dossier avec impatience, et commença à le feuilleter, très vite, avant de soudain s'arrêter, une pli de concentration sur son front, sourcils froncés. Elle lisait, concentrée.
Depuis des mois, le travail ne cessait jamais. La conseillère en stratégie militaire et diplomatique du gouvernement d’Hypnos était fort occupée. Depuis plus d’un an, elle avait littéralement emménagé dans son bureau. Ses appartements officiels étaient si proches de son lieu de travail que la porte qui les séparait était ouverte quasiment en permanence, et les dossiers avaient envahi ce qui était censé être sa chambre.
Un léger soupir lui échappa. Elle regrettait un peu, au fond, le temps où elle s’était isolée à Artgard. Cela faisait six ans déjà, et là-bas, loin de toute position officielle, elle avait réussi à retrouver un semblant d’équilibre, avant que tout ne soit de nouveau bouleversé, et qu’elle reparte s’installer à Hypnos. Derrière elle, elle avait laissé Haribo, la boule rose volante qu’elle avait récupéré dix ans plus tôt suite à un stupide concours.
Elle était là. Il le sentait. Il le savait. De toute façon, il la voyait presque à la fenêtre. Allez, encore un effort ! Plus qu’un petit effort, et il l’atteindrait !
Haribo était d’une race indéfinie. C’était une boule rose, qui volait. Il y avait des yeux, qui paraissaient toujours contents, et parfois une bouche, qui dévoilait un grand sourire. La plupart du temps, il semblait flotter par lui-même, mais une ou deux fois, elle lui avait vu des ailes. Haribo était très affectueux, voire même collant et ne possédait aucun sens de la discrétion, et encore moins de notions de l’intimité.
Elle avait participé, dix ans plus tôt, poussée par Deus, son compagnon de l’époque, à un concours organisé lors d’une fête. C’était là le lot dont elle avait hérité, et elle y avait beaucoup réfléchi depuis: elle était persuadée qu’Haribo était le fruit d’une erreur d’un mage. Un mage qui aurait bien voulu se créer un familier de magie pure, et s’était soudain retrouvé avec cette boule couleur de bonbon dont il ne rêvait que de se débarrasser. Le concours avait été une parfaite opportunité pour ça, et c’était Séléné qui en avait hérité. Elle était persuadée que ça s'était passé comme ça.
Il y a dix ans, elle était plus tendre qu’aujourd’hui, mais déjà, elle ne rêvait que de donner Haribo au premier venu, si possible un enfant rêvant d’un chien. Le problème, c’était que Deus s’était attaché au nouvel arrivant, et que dès qu’elle parlait de s’en débarrasser, il lui faisait un caprice. Alors, ils l’avaient gardé, mais lorsqu’ils s'étaient séparés, qu’elle était partie sur Artgard pour se remettre de sa trahison, c’était avec elle qu’Haribo était resté. Elle n’avait plus eu, alors, le cœur de l’abandonner. Il était resté à Artgard avec elle, le temps qu’elle se remette, le temps que s'apaise le chaos, mais lorsqu’elle était repartie à Hypnos, elle l'avait laissé là-bas. Elle n’avait pas le choix: c’était une nouvelle vie, et elle se devait d’être discrète, tout d’abord, puis, une fois nommée au gouvernement, crédible. Ceci était incompatible avec une boule rose émettant des bruits aigus la suivant partout.
Comme elle était haute cette fenêtre ! Pourquoi donc avait-elle besoin d’aller se réfugier si loin du sol, elle qui jusque là vivait entre les pierres, au cœur de la ville oubliée d’Artgard enfoncée dans la montagne ? Il avait du mal à aller jusque là.
Elle souffla du nez, et se reconcentra sur son dossier. Ce n’était vraiment pas le moment de se laisser aller à de la nostalgie ! Dehors rampait le menace des ténèbres, et la voilà qui pensait à Haribo ! N’avait-elle que ça à faire ? Vraiment ?!
En plus, Haribo allait bien. Elle passait parfois le voir à Artgard. Il était devenu la mascotte de la ville, et le peu d'habitants qu’il y avait semblait bien prendre soin de lui. Elle soupira, les épaules lâchées.
Haribo avait fait capoter un certain nombre de missions et d’infiltrations. Il avait gâché des moments d’intimité, il avait troublé son repos. Il avait été bruyant quand elle avait besoin de silence, il avait été là quand elle ne désirait que la solitude.
Il l’avait agacée, elle avait voulu cent fois qu’il ne soit pas là. Elle l’avait laissé derrière elle, en s'assurant qu’il aille bien et … Était-ce des gazouillis à sa fenêtre ?
Elle se leva. Il n’y avait jamais d’oiseaux ici, c’était trop haut, trop loin des arbres, il y avait trop peu de perchoirs. Méfiante, prête à atomiser la menace qui oserait ainsi se présenter à elle, gazouillante à sa fenêtre, elle se déplaça aussi souple qu’un chat dans la pièce pour se rapprocher de la source du bruit.
Elle était là ! Elle était là ! Tout près ! Enfin !
Il y eut un éclair rose, suivi d’un grand bruit de verre brisé, et soudain quelque chose la percuta de plein fouet. Séléné ne sut jamais pourquoi, comment, elle avait choisi à cet instant précis de ne pas déverser sa magie sur l’intrus, et le pulvériser, mais elle ne put que s’en féliciter.
Contre elle se blottissait en gazouillant, se frottait en frémissant une boule rose d’environ trente centimètres de diamètre. Douce, elle sentait la fraise, le sucre,et le feu des cheminées d’Artgard. Séléné, surprise, ne sut tout d’abord pas comment réagir. Cela faisait plus d’un an, à présent, que personne n’avait jamais tenté de la câliner, de la toucher. Et de toute façon, depuis toujours, elle fuyait les contacts. Pourtant, à ce moment précis, elle comprit que non seulement elle n’avait pas le choix, mais qu’en plus, elle en avait envie.
Renversée sur le sol, elle commença à gratouiller la petite créature flottante, qui gazouillait de plus belle à chaque marque d’affection. Elle était incapable de dire comme cela dura, mais la vague d’affection et de bonheur qui l’envahissait, qui montait, montait, irrépréssible, faisant céder toutes ses digues, lui suffisait. Et, pour la première fois depuis des mois, des années peut-être maintenant, elle rit.
Jamais Séléné n’aurait cru que retrouver Haribo puisse lui faire si plaisir. Jamais elle n'aurait cru qu’on tiendrait suffisamment à elle pour traverser un océan et deux continents pour la retrouver. Jamais, non plus, elle n’aurait pensé que c’était dans son lien avec une boule rose affectueuse quoiqu’agaçante que résiderait son humanité. Jamais elle n'aurait cru qu’un jour, Haribo l’empêcherait de sombrer, de devenir qu’un monstre d’efficacité, une machine à stratégie.
Il était avec elle. Il n’était plus seul. Il l’avait retrouvé, elle l'aimait, elle aussi. A présent, jamais plus il ne la quitterait.
Des années plus tard, des archéologues seront confus: mais qu'était donc cette boule rose gazouillante qui apparaissait dans toutes les descriptions de l’une des grandes mages d’Elysion ? Pourquoi cette chose étrange accompagnait toujours l'une des stratèges les plus respectées ? Quelle était sa fonction ? Pourquoi ne s’éloignait-elle jamais de plus d’une cinquantaine de centimètres ?
Jamais ils n’imagineront qu’Haribo était ce qui permettait à Séléné Saralondë de ne pas s’oublier, de ne pas disparaître derrière sa fonction, ses gardes, ses titres.