Le camp était plutôt calme pendant cette matinée. Tout le monde s'affairait à préparer la journée qui s'annonçait. Tout le monde même Nikki, qui avait prévu de dormir un peu plus pour sa première journée à l'abri depuis quelques jours. Mais non, une grosse main sur l'épaule l'avait réveillée de son lit superposé et avait marmonné quelque chose. Un service ? Si tôt le matin ? Aie aie... Il lui revaudrait ça ! Bien plus que n'importe quel autre service ! Elle exagérait bien sûr.

Un Finlandais devait passer pour récupérer deux trois babioles au camp. Apparemment, lui et sa sœur les fournissaient assez largement en médicament pour qu'il puisse venir taper dans les stocks divers du camp. Après tout, il fallait bien entretenir les relations externes non ? En tout cas, ce mec-là ne voulait pas les entretenir..

Elle descendit de son lit, passa un gant de toilette sur son visage pour se réveiller avant d'aller d'un pas décidé accueillir "l'attardé". La blonde avait grimacé face au mot. C'était loin d'être sympa.

- Salut ! Je m'appelle Nikki, c'est moi qui vais t'accompagner aujourd'hui ! S'exprima t'elle dans un Anglais parfaitement compréhensible.

Il n'aimait pas laisser son arc à l'entrée. Il n'aimait pas d'ailleurs le laisser n'importe où ailleurs que dans ses mains, il s'y était diablement attaché depuis le temps qu'il l'avait. Mais le soucis de l'archerie, ce n'étaient pas les flèches -il avait pris le coup pour les fabriquer - mais les pointes qui restaient parfois figées dans un crâne putride. Prenant sur lui, Vilho était venu seul au camp tandis que Saukko l'avait mis à la porte de son son labo, prétextant qu'il la déconcentrait. Le Finlandais apprécia grandement en revanche l'emploi de l'anglais de la blonde mais ne la salua qu'avec une main tendue et un sourire charmeur.

Le temps de réaction de la blonde fut un peu long à serrer sa main. Il comprenait ce qu'elle disait apparemment. Un sourire en retour et ils étaient partis dans les couloirs du camps, froids et teinté par la lumière des néons.

- On m'a dit que tu étais venu chercher des pointes, c'est ça ? C'est tout ? Peut-être que tu as une liste ?

Les instructions de l'autre gars étaient sommaires, du coup elle ne savait pas trop a quoi s'attendre.

Il avait toujours des listes quand il venait ici, ou du moins de quoi en écrire une sur le tas. Vilho sortit de son sac en bandouillère un carnet qui avait connu des jours meilleurs, le temps de retrouver la page où il notait le matériel que lui et sa sœur venaient prendre régulièrement. Du doigt, il indiqua la ligne qui correspondait à ses pointes avec les indications plus techniques de ce qu'il cherchait exactement.

Nikki ralentit le pas au moment ou elle vit qu'il cherchait dans son sac. Un rapide coup d'œil sur la ligne qu'il désignait et un hochement de tête.

- Tu veux un nouveau carnet aussi ? Avec un crayon peut-être ? Je sais que les militaires du camp peuvent être tatillons a vous donner des ressources, mais je peux m'arranger, surtout pour du papier qui ne serre a personne.

L'auburn eut pour une fois une réelle réaction positive sur son visage, celle d'une surprise agréable : la belle relevait significativement le niveau de la base et il en était... interpellé. Vilho n'allait certainement pas cracher sur du papier de bonne qualité et il lui hocha la tête en retour avec un sourire en coin. S'il gagnait en plus une alliée dans ce nid de vipères..

Il avait l'air vraiment content qu'elle lui offre du papier. Les crevures dirigeantes ne se rendaient si peu compte de sa valeur ? Il avait une sœur qui savait faire des médocs... Certes, au camp, il y avait une tripotée de médecins, mais quand même... Une fois rentrée dans la réserve, elle s'activa pour prendre les pointes. Vérifiant qu'il n'y avait personne, elle ajoute un carnet, quelques crayons et un stylo.

- Ne le dis à personne. Petit clin d'œil complice.

Un rire sans son secoua ses épaules ; ce n'était pas comme s'il pouvait parler à qui que ce soit. Vilho accepta les présents et les rangea précautionneusement dans son sac en bandoulière. Histoire de cacher leur semi-méfait, l'archer les éloigna de la réserve pour lui écrire un mot : "Ton nom ?"

Oh ? Elle le faisait rire ? Et bien, il avait au moins une pointe d'humour.

- Nikki et toi ?

Ses pas continuèrent doucement dans les couloirs. Et maintenant ? Peut-être qu'il voulait un peu rester au chaud. Peut être fallait il continuer la conversation.

- On m'a dit que tu vivais avec ta sœur dans la pharmacie. Vous nous fournissez en médicaments?

Le "Vilho" écrit rapidement par la force de l'habitude fut ensuite suivit par la réponse demandée. "Saukko fabrique nouveaux. Plus Pas assez de réserve." Il tapota le bout de son crayon avant de se reprendre plus lisiblement. "Que fais-tu à la base ?"

- À la base... Pas grand chose. Ma mission, c'est surtout d'aller dehors en éclaireuse, de faire des échanges avec les camps de survivants, etc... Ici, je me repose, je prépare les prochaines expéditions, je fais la nounou aussi de temps en temps avec les gosses.

Nikki remonte doucement le couloir pour le ramener à la sortie. Elle ne sait pas trop si le perdre dans le camp est une bonne idée ou pas.

Vilho arrivait à l'écouter, marcher, ignorer les autres gus qu'ils croisaient et répondre à Nikki. "Je suis chasseur." Sa jumelle allait hurler s'il proposait à la blonde de l'accompagner pour ses repérages dans des zones plus à risque.

Nikki continua à avancer doucement tandis qu'elle lisait la réponse sur le carnet.

- Ouh... Ca fait un bail que je n'ai pas chassé !

C'était assez relatif comme notion de temps. Peut-être quelques semaines... Elle vivait de ce que le camp lui donnait maintenant et de ses trocs avec l'extérieur.

- Et... Vous n'avez pas voulu venir ici ? Ta sœur aurait sûrement pas mal de matériel ici.

Ah... LA question. Pour le coup, il eut du mal à trouver quoi lui répondre. Trop chiant ? Allergique aux connards ? Pas le genre toutou obéissant ? Vilho avait toujours eu des soucis avec les cons ennuyeux qui voulaient le commander et y'en avait à la pelle ici. Le temps qu'il trouve quoi écrire, deux mioches courraient vers eux avec des "Nikki !!" qui lui fit hausser un sourcil.

Plutôt concentrée sur leur conversation, Nikki rattrapa à la volée les sucres d'orge qui lui courraient dessus. Pourquoi diable n'étaient ils pas sous la surveillance d'un adulte responsable ?! Elle regarda Vilho d'un air désolé. Ils étaient en public et elle ne pouvait rien faire de très grave. Un bisou sur chaque joue des cupcakes face à elle.

- Qu'est-ce que vous faites ici ? Vous voyez bien que je suis occupée...

Elle prit un air semi-grognon.

"C'est qui le monsieur avec toi ?" lui demanda un des gamins et Vilho remarqua un détail sur la main de l'enfant qui l'intrigua. Lui prenant le poignet sans trop de violence -d'une manière relative s'entend- pour mieux voir, il mit en évidence malgré les protestations de la demie-portion un trait rouge vif qui marquait la peau tendre. Mais pas de coupure... De la peinture ? L'archer fronça les sourcils : où ces gosses avaient-ils déniché des pots de peinture ??

- C'est Vilho, il travaille avec sa sœur pour apporter au camp des ressources TRÈS précieuses. Il ne peut pas parler, mais il peut entendre donc ce n'est pas une raison pour dire des bêtises ou manquer de respect.

Un petit regard moralisateur. Elle essayait de faire tout ce qu'elle pouvait pour qu'ils ne deviennent pas, adultes, pourris ou mal éduqués.

- C'est de la peinture ne t'inquiète pas.

Il eut un regard surprit pour Nikki, le bras du gosse toujours dans sa main, puis il reprit un air plus neutre... quoiqu'un peu plus en confiance. Il dût relâcher le gamin pour noter un nouveau message à l'intention de la blonde : "Beaucoup de réserves de peinture ?" Certainement s'ils laissaient des enfants jouer avec.

Bon, il tenait son petit pancake depuis un moment-là... Penser qu'il a des médicaments... Qu'il peut aider à l'extérieur... Ouf, il le lâche. Toujours son sourire sur les lèvres, Nikki eut un semi-hochement de la tête.

- Oui, bon... . Les militaires avaient récupéré pas mal de pot de peinture murale pour pouvoir faire des signes dans la ville. Au final, trop grosse quantité, ils ne servent à rien. On ne les laisse pas jouer avec celle-là. Nocif tout ça...

Vilho rajouta "Pour enfants ?" sous sa question et essaya un petit sourire à la Klyde pour convaincre Nikki de lui montrer. Plan B, il pouvait toujours rédiger un message au gosse, en espérant qu'ils leur apprennent encore à lire ici et de l'anglais qui plus est. Quoique, pour des trucs simplissimes, il savait l'écrire en norvégien.

- Oui oui... Tu es intéressé par la peinture ?

Nikki reposa l'une des petites brioches par terre avant de leur prendre la main. Il fallait les rameners à la garderie ou au moins leurs cours histoire qu'ils ne courent pas partout dans les tunnels.

- Ca ne te dérange pas si on fait un détour pour que je les ramène sous bonne surveillance ?

Il hocha la tête et suivit tout ce beau monde. Jetant par moment un regard où ils allaient pour se repérer, Vilho cherchait dans son carnet des croquis plus travaillés que d'autres pour les montrer à Nikki ; un dessin valait mieux que cents mots et l'adage était on ne pouvait être mieux adapté en ce qui le concernait. Sans surprise, c'était un portrait de Saukko en extérieur, cheveux au vent et l'air serein, qu'il lui présenta quand les morpions retrouvèrent leur groupe.

C'est bon, les beignets en sucre étaient entre de bonnes mains et elle pouvait retourner à son accord politique. Observant le dessin quelques instants, elle sourit.

-C'est super joli ! Dans une de mes planques, j'avais entreposé les toiles du magasin de kraft de la ville pour faire du feu pour l'hiver... Mais peut être que tu peux les récupérer si elles n'ont pas pourri.

Vilho comprenait la nécessité de brûler des toiles ou des livres pour survivre mais son âme d'artiste avait toujours un petit pincement à cette idée. Il hocha vivement la tête à la suggestion de Nikki, avec un sourire en bonus, et reporta son attention sur les demis-portions. Les gamins crayonnaient sur des bouts de feuilles froissées des animaux (enfin il pensait reconnaître un animal mais de là à dire si c'était un cheval ou un chien...) mais aucun adultes dans les environs pour les surveiller. "L'est trop bô votre dessin m'sieur Vlo !" l'alpaga le gosse la peinture rouge. "C'est qui ?"