Rappel du premier message :

CONTRAT DE NOT'RP !

   - Statut du RP : Ouvert à une incrustation surprise (demander par MP au préalable)
   - Type de RP : Normal
   - Tour de jeu : Dans l'ordre de réponse
   - Délai maximum d'attente de réponse : Deux jours
   - Sauts de tours : Un seul
   - Autre : Promis, Klyde ne fera pas de mal à Anoushka si elle ne fait rien de... lupin.  
   

Il regrettait déjà son ancienne maison... Il y avait trop de gens ici, trop de bruits et trop de choix. Trop d'imprévus également. Klyde n'aimait pas les imprévus. {Mais ils sont riches d'expériences et de connaissances à venir, Trésor. Vois cette mésaventure comme ta première épreuve dans le monde.} D'accord, Klyde n'aime toujours pas les imprévus mais il se promit de voir les choses différemment. Ce n'était pas un drame s'il ne comprenait encore rien aux transports par dirigeable, s'il avait lamentablement manqué la capitale et qu'il lui fallait trouver un moyen pour rentrer à Moscou, sa valise sur les talons. Mais la capitale qu'en même... C'est grand une capitale, non ? {Allons mon garçon, rien n'est un hasard. Le Seigneur a sûrement prévu quelque chose pour toi ici, à toi de chercher.} Resserrant son manteau trop large pour lui autour de ses épaules, son chapeau vissé sur sa tête pour protéger ses yeux du regard des passants, le jeune homme prit sur lui et entreprit de se diriger vers la bourgade la plus proche où il pourrait trouver une gare (plus jamais le dirigeable, plus jamais). Le temps était relativement doux pour un mois d’aout mais les nuages qui se formaient dans le ciel étaient sans appel : s'il ne se dépêchait pas, il finirait sous la pluie. Et il n'avait rien d'assez chaud dans ses affaires si cela arrivait. Et ça arrivera sûrement.

Le vieil homme sourit. Il était fier du croisement qu'il avait obtenu entre une lignée de Bergers du Caucase et des chiens de traîneau de Sibérie. Sobaka était fort, loyal et intelligent. De quoi protéger les moutons des loups et autres prédateurs des alentours ; des hommes aussi, voleurs et... autres. La grange était une bâtisse de taille moyenne, bien agencée et entretenue avec un soin évident. Le lit de Klyde avait été installé en hauteur, pour qu'il ne soit pas dérangé par les bêtes. Plusieurs épaisses couvertures avaient été disposées sur de la paille fraîche et d'autres attendaient à côté pour se protéger du froid. Il y avait même de chauds habits de nuit déposés sur une petite table en bois à côté.

Le garçon resta un petit moment sur le pas de la porte, observant son nouvel environnement, puis leva les yeux quand le vieil homme lui indiqua sa couche. C'était bien plus qu'il ne l'avait imaginé et il l'en remercia. Un brin habitué par son invité peu loquace, le brave lui souhaita un bon repos et l'informa de ne pas hésiter s'il rencontrait un soucis durant la nuit. {Ils sont vraiment charmants, tu devrais te souvenir d'eux à l'avenir.} Klyde acquiesça mentalement, hissa valise et manteau sur son lit et observa les bêtes pendant de longues, longues minutes pour s'assurer qu'il ne risquerait rien (même s'il savait qu'avec autant d'animaux autour de lui, il ne dormirait que d'un œil). Les vêtements mis à sa disposition étaient doux et chauds, quoiqu'un peu grands pour lui (il perdait le pantalon s'il restait debout). Une fois la lampe éteinte, Klyde entreprit une dernière prière à voix basse, la peluche logée dans sa main gantée.

Les moutons regardèrent placidement leur invité pour la nuit en machouillant leur paille. Ils ne semblaient pas intéressés et cessèrent rapidement de faire attention à lui. Le gros cheval de trait était plus curieux, il tendait le cou pour l'apercevoir et, parfois, ses gros naseaux soufflaient quelques volutes de poussières vers Klyde. Sobaka, lui, ne dormait pas. Il ne cessait de faire des allers-retours, des moutons à la porte, comme s'il craignait quelque chose. Puis, soudain, il cessa son manège et les sons de la nuit ne furent plus dérangés... jusqu'au petit matin où Anoushka déboula comme une furie dans la grange, déclenchant les aboiements joyeux du chien.

Klyde n'avait pas osé touché le cheval quand il approchait son nez de lui ; pas de nuit, pas avec les histoires sur leurs longues dents. Mais du peu qu'il avait vu de la bête, il paraissait bien plus grand que ceux découvert dans les livres (ils devaient aimer les animaux géants ici). Anoushka, quant à elle, avait de très bonnes méthodes pour tester ses réflexes. Entre l'attaque le câlin d'hier et le réveil du matin, il avait manqué de peu de dégainer son couteau caché et, au mieux, de lui faire peur. On l'avait entrainer à devoir faire face aux démons, pas aux petites filles hyperactives de huit ans. Elle le retrouva donc un poil plus endormi que d'ordinaire, en tenue de nuit, les cheveux ébouriffés et Sobamoumoute placé dans son chapeau à côté de l'oreiller. Et un vague grognement en guise de bonjour.

Anoushka avait réussi à dormir quelques heures durant la nuit mais les premiers rayons de l'aurore l'avaient instinctivement réveillée. Dedoula était déjà dehors, près de la grange, en train de réfléchir au moyen de sortir les moutons sans réveiller leur invité. La petite fille ne se posa pas plus de questions que cela. Elle bondit entre les battants de la porte entrouverte, salua Sobaka en lui fonçant dessus - ce que le chien lui rendit bien. Devant leurs roulés boulés, les moutons se mirent à bêler, le cheval à hennir, et le chien à aboyer en écho ; l'heure du manger avait sonné. Au premier mouton dehors, Sobaka fusa à sa suite pour veiller sur lui et Anoushka monta à toute vitesse à l'étage pour sautiller devant Klyde. Elle avait au moins pensé à enfiler une veste d'extérieur et des bottes par-dessus ses habits de nuit. "Il fait jour ! J'ai faim, pas vous ? On va manger avec Baboula avant d'aller voir le père d'Andrei. Venez !"

Trop. De. Bruits. Décidément, trop de bruits. Dans un flou encore ensommeillé, Klyde se dit que le trio (quatuor) Chien-Moutons-Cheval(-Anoushka) n'était pas le plus agréable des réveils qu'il eut droit. Pas le pire, certes, mais certainement le plus cacophonique. {En voilà une qui semble bien plus matinale que toi} s'amusa Sveta. Cette petite devait avoir un système à vapeur intégré, ce n'était pas Dieu possible. Parlant de Dieu... "D'abord prières. Manger après." Il avait ses priorités. "S'habiller quand ?" s'enquit-il en remarquant la tenue de nuit de l'enfant. {Il serait bien Trésor que tu puisses aligner plus de deux mots tout de même.} Klyde se frotta les yeux et s'ébouriffa les cheveux, autan pour se réveiller que faire taire la voix qui se moquait de lui.

Voir Monsieur Klyde aussi endormi avait chassé son enthousiaste, ou du moins lui avait rappelé sa courte nuit, et le fait qu'elle n'avait pas encore mangé pour se requinquer (et qu'elle ne pourrait pas dormir en "surveillant" les moutons avec Dedoula). D'ailleurs, elle devait le dire à Monsieur Klyde, ça ! Elle avait failli oublier. "J'vais rester avec vous, aujourd'hui. Vous pouvez vous habiller avant de venir manger. Mais faites vite, hein !" Son estomac gargouilla avec force et elle ajouta avec un petit sourire contrit "S'il vous paît. Ce sera de la bouillie d'avoine avec du lait de brebis chaud ! Moi, je m'habille après parce que je me salis tout le temps et Baboula, elle préfère que je salisse les habits de nuit que les habits de jour. Même si je ne comprends pas pourquoi : des habits sales, ce sont des habits sales, qu'ils soient de jour ou de nuit, non ?" Son grand-père l'appela dehors, pour qu'elle le laisse s'habiller tranquillement.

Il n'avait rien compris à son charabia. Juste qu'il devait être habillé et venir manger ensuite. Et rapidement. Le cheval s’ébroua une fois encore dans son box quand sa petite maîtresse quitta la grange ; ce fut comme un interrupteur qui obligea Klyde à se lever et répéter les mêmes habitudes depuis treize ans. Une fois changé, il rangea du mieux qu'il put sa couche et Le salua pour cette journée, Lui assurant son entière dévotion, Le remerciant pour Sa mansuétude. C'est ce qui lui prit le plus de temps mais tout nouveau jour se devait de commencer ainsi. Quand il arriva dans la salle à manger, ses affaires sous le bras et la peluche dans une main, la grand-mère était en train de disposer les bols sur la table. "Bonjour madame" lui dit-il poliment, un peu plus réveillé (ce qui chez lui, ne semblait pas faire une grande différence que d'ordinaire).

Anouskha s'était finalement habillée pour patienter. Ses yeux brillaient d'une faim dévorante, et non de gourmandise. La grand-mère l'avait emmaillotée de plusieurs couches de serviettes pour éviter qu'elle ne salisse son chemisier et son pantalon. Elle avait mis sur sa tête les lunettes d'aviateur de son père, ébouriffant sa tignasse au passage, et l'amulette de sa mère était visible. "Asseyez-vous, Monsieur Klyde ! Baboula a fini et ce matin, on a même droit à de la confiture !" Elle sautillait sur sa chaise, heureuse comme un pou sur Sobaka. Ouvrir un pot de configure, c'était une grande occasion. Comme manger de la viande. "J'ai hâte de voir le véhicule à vapeur du père d'Andrei, pas vous ? Oh Baboula, je peux aller avec eux ? S'il te plaît !" Elle lui fit ses yeux de louveteau chiot battu. "Je serais sage, et le père d'Andrei me ramènera. Dis ouiiiii !" La grand-mère afficha une moue dubitative, et regarda vers Klyde, indécise.

Il se demanda ce qu'il avait fait de mal pour que la vieille dame le regarde comme ça. Il avait pris trop de temps pour venir ? Non, Sveta lui assurait que c'était plus au sujet de sa petite-fille. "Anoushka est avec moi depuis mon arrivée, je suis habitué." Les mots étaient peut-être trop maladroits pour lui exprimer ce qu'il pensait. A vrai dire, lui-même ne savait pas trop ce qu'il voulait vis-à-vis de l'enfant. Il l'aimait bien, il n'avait pas à la craindre. Une part plus rationnelle de son esprit lui soufflait qu'elle arriverai mieux à faire comprendre au père d'Andrei ce qu'il souhaitait réellement (et éviter de reproduire le fiasco du dirigeable...). "Je te rends Sobamoutmoute, merci" dit-il à la petite survoltée en lui tendant la peluche, pensant qu'il devait d'abord lui remettre son bien avant de s’installer.

Baboula sourit gentiment à leur invité, se voulant rassurante, et Anoushka lui sourit également. Elle attrapa vivement Sobamoumoute quand il lui rendit et le serra contre elle avec un soulagement évident. Ça lui avait coûté de le prêter à Monsieur Klyde mais le Seigneur disait bien d'aider son prochain, et elle avait été heureuse de le faire. "Tu as été sage ?" demanda-t-elle à la peluche. "Moi, j'ai été courageuse. J'espère que tu as bien fait ton travail avec Monsieur Klyde. Oui, tu m'as manqué. Moi aussi ? Oh vraiment, c'est gentil." Elle souffla en aparté à Klyde : "Sobamoumoute a trouvé que votre chapeau, c'était un lit parfait." Son dialogue avec la peluche fut écourtée quand Baboula posa devant elle, et devant Klyde, un bol d'avoine au lait de brebis agrémenté d'une généreuse portion de configure. Un air de pur contentement s'afficha sur son visage et elle entama son petit-déjeuner avec une faim de loup.

Klyde resta debout dans un silence troublant, fixant la fillette et sa peluche le temps que sa pauvre tête fasse le tri des informations et questions qui s'y bousculaient. Le chaos sous son crâne était tel que même Sveta n'arrivait pas à en placer une. Sobamoutmoute pouvait parler ? Il n'avait rien dit de la nuit pourtant. Qu'était-il alors ? Une sorte de démon ? Un esprit enfermé dans un objet ? L'eau bénite suffirait-elle ou devait-il le détruire ? Mais il protégeait Anoushka apparemment. L'avait-il aussi protégé ? Protégé de quoi ? {Tu inquiètes la dame Trésor, pose-toi et mange un peu.} Il revint à lui dans un léger sursaut, surprenant la vieille femme qui lui demandait s'il allait bien. "Oui, ma faute, merci" répondit-il par automatisme. Elle n'était pas plus rassurée mais laissa l'étranger se restaurer en paix. "Il te parle ?" demanda finalement Klyde quand ils furent seuls.

"Bah oui !" lui répondit d'abord Anoushka sur le ton de l'évidence. Puis elle aperçut enfin, ayant levée le nez de sa bouillie, regard de Monsieur Klyde. Un o d'étonnement déforma sa bouche parsemée de grains d'avoine ici et là. "Oh ! Mais c'est un jeu, Monsieur Klyde. Même si c'est vrai que j'avais donné une mission à Sobamoumoute. Il est rassurant, tout doux, tout moelleux. Mais je sais qu'il ne parle pas. Puis, c'est un chein laineux, il aboierait plutôt que parler. Comme Sobaka. Mais Sobaka serait jaloux si Sobamoumoute était un chien vivant comme lui. Et moi, je l'aime Sobaka. Sobamoumoute aussi, mais ce n'est pas pareil. Parce que Dedoula, y veut pas que je dorme avec Sobaka. Il a du travail avec les moutons, mais moi j'aurai bien voulu. C'est comme un gros Sobamoumoute qui ronfle !" Elle cessa de parler, essoufflée, et bu copieusement l'eau que Baboula lui tendit, revenue de la cuisine.

Le brouhaha qui agitait ses pensées fut balayé par un unique "Il ne parle pas" qui le rassura atrocement. Pour le reste, il avait vaguement compris qu'elle parlait de l'immense chien noir et blanc mais sans accrocher les détails (de plus, elle babillait de nouveau bien trop vite). Il se contentait de poser ses affaires au pied de la table et d'enfin prendre place devant son bol. Pour une fois, c'était un plat qu'il avait souvent mangé ; bien que la confiture soit une originalité bienvenue. Sveta ne disait rien, Anoushka ne lui posait apparemment aucune question à laquelle il devait répondre. Quand le silence se fit de nouveau, il prit à son tour la parole de façon posée, en cherchant ses mots. "Tu as dit... que tu lui avais confié un travail, avec moi, une mission. Pourquoi ?"

Anoushka dut avaler sa grosse bouchée avant de pouvoir parler. "Et bien, vous étiez triste hier, Monsieur Klyde. Alors j'ai demandé à Sobamoumoute de chasser les mauvaises pensées pour la nuit, comme ça vous pouviez dormir tranquille." Un doute passa sur son visage, s'entendant dans sa voix soudainement timide : "C'est bien le cas, hein ? J'espère que Grandmont - c'est le cheval, bah, j'espère qu'il n'a pas été trop curieux. Il aime bien qu'on lui caresse les naseaux. Mais sa tête est aussi grosse que moi, c'est impressionnant, non ?" Elle rit gaiement et entreprit de finir sa bouillie. Baboula avait été prévenante de la recouvrir de serviettes et elle ne manqua pas de se faire remonter les bretelles mais un sourire contrit eut tôt fait d'obtenir le pardon. "Alors, Baboula, j'peux aller avec Monsieur Klyde ? Le père d'Andrei me ramènera." La grand-mère soupira, fixa Klyde, puis acquiesça finalement.

A-t-il été triste hier ? Il n'avait pas fait attention. Mais elle l'était quand elle parlait de ses parents, elle aurait dû garder la peluche avec elle. "Je ne sais pas, les rêves sont-ils de mauvaises pensées ?" Au moins il comprenait mieux l’intérêt que le cheval avait eu pour lui. "Sobaka aussi est très grand et." Klyde coupa sa phrase, peu certain s'il avait le droit de demander plus. Il secoua la tête, conscient qu'il abusait de la gentillesse de la petite fille. A la place, il préféra terminer son petit déjeuner en silence, ne laissant pas un seul flocon d'avoine trainer dans son bol.  Le lait de brebis lui dessinait des petites moustaches que parfois il essuyait d'un coup de langue. Parfois.

"Mais oui, Monsieur Klyde, les mauvais rêves sont aussi chassés par Sobamoumute." lui dit Anoushka en agitant sa cuillère sur le ton de l'évidence. Elle avait la bouche recouverte de grains d'avoine. Même son nez en arborait fièrement un. Quand Klyde s'arrêta en pleine phrase, elle le dévisagea avec une curiosité mal cachée. "Et quoi, qui ?" Mais ses moustaches de lait la firent éclater de son rire de crécelle. Elle en tremblait tellement qu'elle manqua de tomber de sa chaise. Il n'y eut que le réflexe de Baboula pour la sauver d'une chute ridicule. Elle en profita pour lui débarbouiller le visage avant de mimer le geste autour de sa propre bouge en dévisageant Monsieur Klyde d'un regard amusé.

Voyant ce qui provoquait tant l'amusement des trois femmes (Sveta n'était absolument pas de son côté sur ce coup), Klyde se frotta activement le bas du visage comme le ferait un petit garçon honteux. Ce n'était pas la première fois qu'Anoushka riait de ses déboires mais comme il préférait de loin la voir joyeuse que triste, il ne dit rien. Juste un brin penaud, décalé, à attendre confusément que la crise passe. Néanmoins, cet 'incident' lui évitait de parler des mauvais rêves que la peluche miracle n'avait pu chasser. Et la question d'Anoushka qu'il avait bien entendue cette fois-ci mais à laquelle il ne souhaitait pas répondre. {Trésor, il n'est pas bien de mentir, même à soi-même.} Ce qui le fit se renfrogner d’avantage dans son mutisme.

Calmée de son hilarité, Anoushka bondit de sa chaise pour sautiller vers Monsieur Klyde duquel elle tirailla la manche pour attirer son regard. "Alors, quoi ou qui ?" lui demanda-t-elle avec insistance, ses grands yeux curieux braqués sur lui. Un doute y émergea bientôt. Elle commençait à se poser des questions sur son mutisme. Il n'avait pas ri comme elle, ni souri comme Baboula. Le doute enfla, charriant dans son sillage des nuages gorgés d'eau, et une petite voix qui avait perdu l'amplitude de la joie. "J'voulais pas me moquer. C'était juste drôle." Elle se mordilla la lèvre inférieure, serrant Sobaboumoute contre son cœur. "Je suis désolée. Pardon. C'était pas gentil de rire aussi fort. Je ris toujours quand je me vois comme ça dans un miroir. Désolée." Elle lui fit ses yeux de petit animal battu et tristounet. "Vous me pardonnez, Monsieur Klyde ?"

Il n'avait même pas parlé de ses parents, pourquoi était-elle triste ? Il y avait d'autres déclencheurs qu'il ne connaissait pas ? C'était... c'était de sa faute alors ? Il avait mal fait, il n'avait pas compris. Sa grand-mère allait-elle le punir ? "Ne... ne pleure pas" finit-il par articuler, endiguant son début de panique à l'idée d'être châtié. Klyde approcha sa main gauche, sa main nue et saine, sur la tête de l'enfant et prononça doucement un "tu n'as rien à te faire pardonner" à la manière des prêtres pour le rassurer d'une bonne action. Il ne savait pas spécialement ce qu'il faisait, agissant par mimétisme car jusqu'ici, ses propres actions n'étaient pas très concluantes. {Tu apprendras} lui souffla Sveta alors qu'il inspirait profondément en 'libérant' Anoushka. "Grandmont est immense" fut tout ce qu'il rajouta.

Monsieur Klyde n'agissait pas vraiment comme elle l'avait espéré. Oh, il la rassurait, pas de crise de larmes à craindre, et elle n'avait pas à s'excuser semblerait-il. Mais il paraissait presque avoir peur, et ça, Anoushka ne le voulait pas. Alors elle se frotta les yeux, serra une nouvelle fois Sobamoumoute contre elle, et lui sourit. "Alors, c'était Grandmont l'autre qui ?" demanda-t-elle sans revenir sur l'autre affaire. "Il n'est pas si grand. Vous devriez voir les chevaux à monter. Grandmont est surtout gros, très large, et très fort. Mais en fait, il est très gentil, c'est juste une grosse peluche." Une idée lumineuse lui vint subitement en tête et elle se remit à sautiller. "Vous avez fini de manger ? J'vais vous présenter mieux à Grandmont, comme ça, vous verrez vraiment un cheval de près !"

Elle souriait. Hallélujah, elle souriait. Il hocha la tête, soulagé, quand elle mentionna le cheval. {Maintenant, dis-lui gentiment ce que tu aimerais.} Il venait tout juste de la faire pleurer, par sa faute. {Elle te le propose, tu ne risqueras pas de la vexer.} Le conflit interne semblait aller en sa défaveur et de toute façon, la Sainte avait toujours raison. "O-oui, je veux bien voir Grandmont de plus près." Il avait la désagréable impression d'avoir remonté le temps et d'être de nouveau à l'âge d'Anoushka. Et il détestait ça. Mais ça passerait, il se reprendrait. {Sourit Trésor, c'est à ton tour.} Le geste fut timide et il chercha à se faire pardonner en tendant sa main à la petite fille, fixant un instant la porte qui menait à la grange, pour qu'elle le traine encore une fois. Elle semblait aimer ça.

Oh, il voulait réellement voir Grandmont de plus près. Anoushka sourit et sauta pour attraper la main tendue et se précipiter dans le même mouvement vers la porte d'entrée. Dehors, il n'y avait plus trace de Dedoula, des moutons ou de Sobaka ; ils étaient déjà partis pour les pâturages. Grandmont avait été laissé à l'extérieur dans son pré. Le gros cheval de trait broutait consciencieusement. Anoushka ouvrit la barrière du pré en sifflotant pour attirer son attention. Grandmont redressa sa grosse tête, agita les oreilles, et se dirigea vers eux de son pas pesant. Il souffla dans le cou de la fillette qui rit sous les chatouilles puis s'intéressa à Klyde. Ses gros naseaux cherchèrent le cou, humant, et frottant les poils sensibles du menton. "Il dit bonjour !" indiqua Anoushka avec un grand sourire.

Voyant que la petite fille ne risquait rien, Klyde laissa le cheval le renifler. Sobaka avait fait la même chose quand il l'avait croisé avec le grand-père hier. Il savait que les animaux étaient sensibles aux odeurs, il avait même appris quelques astuces pour les induire en erreurs mais ici, chez Anoushka, au milieu de ces bêtes innocentes, il n'en ferait rien (pas qu'il ne soit pas en permanence sur ses gardes, juste pacifique). Le souffle de Grandmont était chaud dans son cou, un brin humide, il chatouillait un peu. "Il est magnifique. Plus robuste que les chevaux que j'avais vu en dessin" dit le garçon, sans oser toucher l'animal. "Ils sont comment ceux de Moscou ?"

"Tu entends ça, Grandmont ? Il dit que tu es magnifique." souffla Anoushka au cheval de trait qui avait baissé sa grosse tête vers elle en comprenant qu'elle lui parlait. Elle articula bien : "Dis mer-ciiii." Grandmont secoua son encolure de bas en haut et son épaisse crinière les fouetta, au grand bonheur de la petite fille qui se mit à rire de bon cœur. Puis il se tourna vers Monsieur Klyde et émit un hennissement puissant, qui ne fit qu'accentuer le rire de sa maîtresse. Il lui fallut un moment pour se calmer et réussir à répondre à la question posée. "J'sais pas trop, Monsieur Klyde. Mais doit y avoir plus d'chevaux à monter et de poneys que d'chevaux de trait. Ou alors pour tirer des charrettes, mais la Capitale doit avoir plus de véhicules à vapeur. J'aimerais bien avoir un poney. Dedoula, y dit que Grandmont, l'est trop grand pour moi. Mais il est si gentil, je sais que je peux monter sur son dos sans danger. Vous voulez essayer ?"