CONTRAT DE NOT'RP !

- Statut du RP : Incrustations possibles (demander par MP)
- Tour de jeu : Dans l'ordre
- Délai maximum d'attente de réponse : 2 jours
- Nombre de sauts de tours autorisés avant que le délai d'attente ne soit plus pris en compte pour le joueur attendu : 2
- Autre : Rythme rapide (sans être express)

Ite Missa Est. La messe était dite et la communion au milieu des fidèles avait toujours sur le médecin un effet apaisant. Debout dans une aile de l'église,un peu à l'écart du groupe, il avait suivi le sermon avec attention, écoutant sans sourciller le passage presque obligatoire sur les zootropes et leur nature démoniaque. Il avait chanté avec les chœurs, ses lèvres récitant par automatisme les traductions des mots qui étaient gravés dans son cœur depuis l'enfance.  Son évêque d'oncle lui avait apprit à aimer Dieu au delà de la religion, à réconcilier avec sa foi sa nature différente. Il lui avait fait boire l'amour du Créateur directement dans les Livres Sacrés mais cela n'était pas toujours suffisant.

Son oncle n'était plus pour lui parler de théologie. Et la plupart des frères et soeurs de la Ligue L'avaient reniés dans leur coeur et dans leurs paroles. La communauté des croyants lui manquait. La Foi c'est toujours un support mais il est agréable, parfois, de croire à plusieurs. De sentir que l'on fait partie de quelque chose qui vous dépasse, qui vous englobe, qui vous berce. Et s'il n'était pas un habitué de cette paroisse précise, s'il ne faisait pas partie de la Grande Congrégation des Fidèles, il avait pu, ce dimanche, se confesser, prier et communier. Et pour ce temps à lui - si rare et si précieux - il se sentait ressourcé.

Pasha n'avait jamais connu ce genre de foi communautaire. Sa relation avec Dieu était personnelle. Unique. Il ne restait jamais très longtemps après la messe et en profitait même parfois pour errer dans les rues à la recherche d'une quelconque figure qui pour une mauvaise raison A ou B avait décidé de ne pas rejoindre la congrégation. Aujourd'hui ce n'était pas le cas.

"Jeune homme si vous vous effacez comme ça il ne faut pas vous étonner qu'on ne vous voit pas." s'entendit répondre le médecin d'un ton franchement agacé comme s'il aurait préféré que son interlocuteur lui rentre dans le lard. "Allons, relevez la tête. Vous attendez le prêtre ? Parce que je crois l'avoir vu sortir..."

Il y a deux ans il serait resté planté là. Heureusement, Pasha s'adaptait plutôt vite. Sa confusion du moment se dissipa quand il parla de prêtre et les radars de son cerveau commencèrent à tourner. Non. Je n'ai pas besoin de parler au Père Ioann. Il analysa rapidement les détails du visage de son interlocuteur avant de passer un regard furtif sur la sacoche qu'il avait ramassé. Vous n'êtes pas de cette paroisse, remarqua-t-il.

Ah bah voilà, il se réveillait le gamin. Tant mieux, il n'aimait pas les petites choses trop fragiles. Il se sentait responsable après et il avait bien assez de responsabilités comme ça. "En effet. Je n'habite pas Moscou. J'ai donc demandé à un ami de me recommander une église pour ce dimanche et il m'a conseillé celle-ci. Le Père... Ioann vous avez dit est-il toujours aussi inspiré ?"

Ce n'est pas à moi de juger le Père. Les instruments de Dieu avait été désigné par le Seigneur Lui-même. Même s'il avait entendu plusieurs sermons médiocres, Pasha savait qu'il y avait toujours une raison pour cette médiocrité. Les voies du Seigneur son impénétrables, Pavel. Ne questionne pas Sa volonté. Les voix étaient ancrées dans sa mémoire ; leur cadence, leur mélodie, les sombre murmures.

En fait, il ressemblait à Iekaterina. En plus jeune et en garçon. Le visage sévère du médecin s'éclaircit d'un sourire à cette pensée. "Certes." Il n'allait donc pas rentrer dans un débat théologique tout de suite, il se souvenait trop bien de la réaction de la noble lors de leur première rencontre, après une autre messe, dans une autre paroisse. "Je peux vous aider à quelque chose, peut-être ?"

L'aider ? Étrange question. Avait-il l'air d'avoir besoin de l'aide ? Possiblement. Bloqué, là, au milieu du chemin. Silencieux, clairement perdu en pensées. Peut-être bien, oui. Son regard descendit encore vers le sac qu'il avait en main. Que transportait-il ?

Bon. Il ne répondait pas. Il ne bougeait pas non plus. Certes, on était dans une église, lieu de recueillement et de patience mais quand même. "Petit ?"

"Petit". Ca aurait pu être dénigrant, mais Pasha n'était pas du genre à se vexer. A quoi bon ? Il n'y avait qu'une seule personne à qui il devait se prouver, une seule personne qui pouvait le juger ; et il n'allait jamais Le décevoir. Vous disiez que vous n'êtes pas de Moscou. D'où venez vous ? Il avait relevé la tête. Au moins il avait appris assez rapidement que la conversation, la vrai, se faisait face-à-face, et non pas face-aux-pieds.

"Un petit village à l'Est de Smolensk." répondit tranquillement le médecin qui, cette fois comme les autres, avait bien préparé sa couverture. "Vous êtes bien curieux dites moi." ajouta-t-il cependant avec un léger sourire pour atténuer le reproche. "Vous êtes toujours aussi attentif aux nouveaux visages dans les environs ?"

Comme chaque citoyen, répondit-il habilement. Entre les voisins qui s'espionnaient et la Milice qui circulait dans les rues comme des limiers* ça n'avait rien de bien étrange. Enfin, je l'espère bien. Sa curiosité n'avait cependant pas comme priorité de partir à la chasse aux démons. Ce devoir était tellement évident, tellement naturel, qu'il ne nécessitait pas de réflexion spéciale. Je ne sors pas souvent du quartier, ajouta-t-il pour expliquer sa curiosité.


*bloodhounds ?

"Je vois." Il sourit à nouveau, vraiment pas vexé. "Mon village n'a rien de particulier, surtout à côté d'une belle ville comme Moscou. Le centre du monde civilisé. Je vous prie d'excuser mes particularismes de provincial."

Je n'en ai pas remarqué. Il n'était pas sûr ce qu'il devrait s'imaginer en entendant "village" et "provincial". Il n'avait guère vu autre que Khamovniki et ses habitants. Il connaissait le boulanger, l'inventeur, la vendeuse de café. De visage, bien sûr. Ils n'étaient pas amis ; à peine connaissances. La... campagne — si c'est bien comme ça qu'il devait designer son lieu d'habitation — est-elle également infesté de démons ?

Il ne sourit plus. Il hoche la tête, gravement. "Il y en a aussi malheureusement. Peut-être moins qu'en ville où il y a plus de monde entassé mais il est affreux de voir qu'aucune famille n'est réellement épargnée."

C'est bien ce qu'il craignait. L'emprise de l'Adversaire est fort étendue. Malgré la puissance du Seigneur, Il avait un succès effrayant. Pasha ne connaissait pas les statistiques — ce n'était pas son domaine — mais l'impression était là. A croire que les démons se multipliaient dans l'obscurité. La Milice n'a-t-elle pas une présence si loin ?

"Elle est présente. Malheureusement trop tard pour sauver les familles des dégâts causés par l'arrivée d'un démon en leur sein." Il ne payait pas de mine le gamin mais autant éviter d'augmenter la présence de miliciens dans les campagnes tranquilles. Il semblait très bavard sur le sujet des zootropes d'ailleurs, bien plus que le reste. Peut-être un apprenti milicien en civil ou bien un aficionado.

La Milice. Âmes pseudo-charitables. Incapables. Corruptibles. Quand il la voyait en action, il ne pouvait que comprendre l'incitation du Seigneur pour la création de leur Ordre. La plupart des Miliciens avait oublié leur devoir divin. Ils servaient la monnaie et le pouvoir, pas Dieu. Dieu y pourvoira.

"C'est aux familles touchées qu'il faut apporter le réconfort de sa Parole et de sa Présence. Moi ça va vous savez." Dieu ne pourvoyait pas à tout et à tous. IL forçait les hommes à avancer, leur présentant des épreuves qu'ils devaient surmonter ou pas. La zootropie en faisait partie. Et l'on pouvait trouver du réconfort dans ses préceptes et dans la certitude qu'IL n'infligeait jamais plus qu'on ne pouvait supporter. "Votre famille a été touchée par le démon ?"

Je n'en ai pas connaissance, avoua-t-il. Il n'avait jamais eu de famille, mais le concept ne l'avait pas manqué. Ses berceuses étaient des parables. Ses disputes des combats. Et vous ? Sa réponse faisait au moins soupçonner qu'il avait déjà été en contact avec ce genre de "familles touchées".

"Je n'ai plus de famille depuis des années." Lyov Kruspin était fils unique et avait perdu son père et sa mère dans un incendie en Biélorussie. Un vrai incendie, il n'avait pris des papiers plausibles quand il avait décidé de son identité civile. Ironique quand il repensait au visage brûlé de son vrai frère. "Mais j'ai des amis qui ont été touchés. Ne dit-on pas que les amis sont la famille du coeur ?"

L'expression ne m'est pas familière. Il n'avait pas d'amis non plus. Il n'en avait pas besoin. Ce genre de relations n'emportent que du risque. C'est comme ça que les démons se répandent aussi rapidement. Ils prennent le visage de vieilles connaissance, de l'aimable boulangère, des meilleurs amis. Ils sèment le doute. Se rapprocher de qui que ce soit était une faiblesse qu'il ne pouvait se permettre.

"Ca ne doit pas être à la mode en ville." Il pose son sac à ses pieds. S'ils doivent parler encore longtemps, pas la peine de se trimbaler tout matos à bout de bras. Puis il se redresse, s'étirant. "Voulez-vous continuer cette conversation ailleurs ? Je crains que la Maison de Dieu ne soit pas le meilleur endroit pour papoter."