Voilà que Caïn avait rejoint la taverne un peu à part de la cité. La Guilde, c'était son nom. C'est là que les aventuriers cherchant un boulot venaient passer le temps. Normalement Caïn s'y rendait seul, Layla avait insisté pour l'accompagner mais il avait été inflexible. Pas question. Quelques habits de moins plus tard, Layla en toute petite tenue avait convaincu Caïn. Il n'était pas vraiment inquiet en fait, il faisait ce genre de mission pour la façade. Même si la présence de Layla augmentait malgré tout un peu les risques, il pensait pouvoir gérer sans mal. Elissa était plus sceptique, notamment au vu de la faiblesse de son compagnon de route vis à vis de la jeune barde.

Bref il poussa les portes de la taverne, Layla sur ses talons. Il portait sa tenue habituelle d'aventurier. Neutre. Il se dirigea vers le bar pour commander une bière pour lui. La patronne était taillée dans un tronc d'arbre, avec un visage rond et teinté de rouge aux joues.
— Rien pour toi pour le moment, Traqueur, dit-elle en servant la bière. Elle boit quoi la jeune fille ? Un lait de chèvre ?

Elle est violente la patronne. Elle sait pas qu'il faut se méfier du laurier qui dort ? Attends c'est pas ça l'expression... se méfier du laurier-rose plutôt ?
Bref... Je ne réagis pas vraiment extérieurement. Je suis en mode sérieux (j'essaye!), si je foire, je donnerai raison à Caïn.
Je souris à la patronne à la place. "Pareil que lui."
J'allais lui répondre que je préfère le jus de pomme (juste pour l'embêter car j'crois pas qu'ils ont du jus de pomme), mais je crois que l'essence d'une mission d'infiltration c'est justement de ne pas attirer trop l'attention sur soi...
Ouais... c'est dur, mon pseudo-narcissime me gratte déjà.

— Elle est en âge ? demanda la patronne à Caïn.
— Excellente question. Je parle pas d'alcool, renchérit Elissa.
Caïn soupira et quitta le comptoir sans même répondre. Il était déjà fatigué alors qu'ils n'avaient même pas trouvé de mission. La patronne servit une bière à la petite et mit le tout sur l'ardoise de l'aventurier. Elle n'était pas inquiète, l'homme payait toujours rubis sur l'ongle. Même quand elle faisait quelques petites erreurs pour grossir la facture.
Caïn rejoignit une table et se posa lourdement dessus. Les journées à venir risquaient d'être longue.

Je perds mon sourire à sa remarque. Je crois qu'il faut que je travaille sur ce point, ça m'fout toujours en rogne ce genre de blague. Un jour ça va exploser sur la mauvaise personne, je le sens.
Je suis Caïn après avoir pris ma bière, avec aucunement l'intention de la boire (bon après mes intentions changent beaucoup en une heure donc je garantis rien non plus). "Pourquoi tu fais la gueule ?" Je lui demande en m'asseyant.

— Je ne fais pas la gueule, je gère un problème avec mes mains, répondit Caïn en levant son verre pour boire une gorgée de bière.

J'hausse un sourcil. Je suis pas certaine de le suivre. "Hm... quel problème ?" Je plisse un peu les yeux, regardant légèrement autour de moi. Je suis pas certaine pourquoi il reste ici si elle lui dit qu'elle n'a pas de missions pour lui ? Ou c'était un code ?

— Elles sont jalouses de mes yeux et désirent pouvoir toucher ce que les yeux ont regardé, expliqua Caïn le plus sérieusement du monde alors qu'il buvait sa bière. L'attente pouvait être longue avant d'avoir une proposition de travail décente, il fallait savoir cultiver la patiente et aussi profiter de la compagnie pour faire passer le temps plus rapidement.

Je sens un sourire mutin s'esquisser et pose mon menton contre mes deux mains en coupe. "C'est la patronne, c'est ça ? C'est vrai qu'elle a de grosses citrouilles... assez intimidantes d'ailleurs. Mais je devrai pouvoir te la capturer."

— Je pensais plus à tes jolies petite pommes bien fermes, répondit simplement Caïn. J'espère que tu es patiente. L'attente peut-être longue, précisa ensuite le jeune homme.

Pff ! Je tourne la tête pour regarder sur le côté, trouvant interessant la manière dont la matronne arrange et ré-arrange ses bouteilles de rhum. "Je ne suis pas patiente, mais... je ferai un effort." Je soupire légèrement. Tu veux dire que je dois rester pendant des heures ici à me retenir de ne pas attirer l'attention ?
De la torture ! A moi !

— Je peux te divertir si tu veux, dit-il en montrant ses mains impatientes.

Je le regarde de nouveau, et me retiens de rire en redressant ma tête. "Avec quoi ? Un tour de magie ?" Je continue en souriant.

— En effet, je compte faire disparaitre mes mains. Tu veux voir ? demanda-t-il ensuite.

Je ne suis pas sûre, d'un côté peut-être qu'il joue, d'un autre, il est peut-être tout à fait sérieux (c'est Shinoki après tout). "Vas y..."
Comme je suis de dos à l'entrée, je ne suis pas le registre des entrées et sorties, mais j'ai une bonne vue sur les accoudés au bar au moins. Enfin, là, c'est surtout ses mains que je regarde.

Caïn se déplaça à côté de la belle, tout contre elle en fait. Il vint lui faire un petit baiser sur la joue, puis un petit sourire.
— Regarde bien mes mains. Elles sont visibles. Et hop !!
Il vint habilement glisser ses mains sous les habits de la belle et les poser contre sa taille, de chaque côté.
Elles sont invisibles.

Hm... je pensais qu'il se montrerait plus réservé à cet endroit mais apparement il ne s'en fait pas de me marquer comme son poteniel point faible. Il est beaucoup plus confiant dans ses capacités que ce que je pensais. Ou alors les gens le connaisse assez ici pour ne pas l'embêter, ou alors c'est pas la première fois qu'il ramène une femme dans cette taverne, ou alors...
Je le regarde entre temps avec une poker face à son tour de magie. "Invisibles et froides." Je pose mes mains pardessus les siennes sur les vêtements et les remonte jusqu'au côtes, plus chaudes. "Les pauvres." J'étire un sourire joueur.

— C'est en effet déjà un peu mieux, confirma Caïn, mais plus haut serait encore meilleur.
Il n'avait pas d'ennemi dans cette cité, ni ailleurs, enfin peu d'entre eux connaissaient sa véritable apparence. Dans tous les cas la petite était sous la protection du rituel d'Elissa, elle serait dure à tuer de manière rapide. Il faudra de la ténacité à son assassin pour lui ôter la vie.

"Avoue..." Je lui susurre en rapprochant ma tête puis en lui embrassant le côté de la mâchoire. "Tu es vraiment Shinoki, hein ?"

Je remarque pas vraiment de changements dans les habitudes des gens autour de nous. Ou alors c'est moi qui n'observe pas bien. La matrone continue de ré-arranger sa collection de rhum, le barde continue de lustrer son harpe, le gars encapuchonné qui porte un arc continue de se noyer dans l'alcool. La serveuse continue de s'entêter contre une tâche dans une des tables.

— Shinoki aurait déjà ses mains sur tes petites pommes, répondit simplement Caïn en retirant ses mains afin de pouvoir boire une gorgée supplémentaire de bière. Tu ne bois pas ? Tu préfères que je commande un lait de chèvre ?

Petites ?! Il exagère. Déjà que c'est petit une pomme. "Je n'ai pas encore soif." Je cale ma joue contre ma main en le regardant. "Et puis je sais pas ce qu'ils font avec leurs chèvres ici."

Caïn repéra une femme entrant dans la taverne, pas le genre des lieux, elle n'avait pas d'arme sur elle. Elle se rendit auprès de la patronne et discuta un moment avec elle. Sans trop d'hésitation la patronne montra la table de Caïn et Layla. La femme remercia la patronne de manière presque servile et traversa la table pour rejoindre l'aventurier et la barde. Elle n'était pas du tout à son aise.
Caïn fit un signe à Layla pour attirer l'attention de cette dernière sur la femme.

Je tourne la tête sans enlever mon menton de ma main.
La femme qui s'approche est une brunette. La peau pâle, les cheveux longs et visiblement soyeux, les doigts nerveusement entremelêlés lorsqu'elle nous rejoint. "Bonsoir... je... on m'a fait savoir qu'il fallait que je m'adresse à vous pour mon... soucis."
On dirait qu'elle n'est pas habituée à ce genre d'entrevue. Je lui souris et me présente. "Moi c'est Layla. Lui c'est..." Je lui jette un oeil, réalisant qu'il ne voudra peut-être pas révéler son vrai nom. "...Shino." J'étire un sourire et l'invite à s'asseoir en poussant le pied de la chaise vers elle.

La femme s'installa un poil rassurée par l'accueil de la belle barde, et aussi parce que l'homme n'avait rien d'inquiétant. A par les yeux légèrement neutre, sans vie, sans doute qu'il s'ennuyait.
— J'ai besoin de quelqu'un pour retrouver mon mari. Il a disparu et la garde se désintéresse de ce cas. expliqua la femme.
Caïn écouta, patiemment, il était le Traqueur.
— Un indice sur les circonstances de sa disparition ? demanda-t-il.
— Mon mari doit de l'argent à des gens peu recommandables, mais je n'en sais pas plus, répondit-elle.

Je remarque que Caïn a une expression plus... lissé depuis l'approche de la femme c'est légèrement perturbant. Davantage car je suis habituée à un autre regard. Je colle ma jambe contre la sienne sous la table par réflexe.

En regardant la femme et ses vêtements, son mari doit être un homme plutôt riche. Elle a de jolies mains manucurées qui ne semblent pas avoir connu de labeur. Et un agréable parfum de jasmin se dégage d'elle.
"Votre mari doit être assez influent, non ? Si même la garde se désintéresse d'un homme pareil..." Je penche la tête sur le côté, ne finissant pas ma phrase, car je ne cherche pas vraiment à l'acculer.

— Pas vraiment, il s'assure juste que je ne manque de rien, expliqua la femme.
Caïn écouta, ses sens aux aguets. Il avait l'habitude de ce genre de situation, mais d'emblée il décida que la femme n'était pas digne de confiance.
— Quel est son nom ? demanda-t-il pour écourter l'entretien. Et le nom des gens peut recommandables.
— Xaviar, marchand de vin et mari aimant, répondit-elle. Je n'ai pas la moindre idée de l'identité de ces gens.