Rappel du premier message :

Jamais Lumi et Ilma n'ont vu autant de monde dans les rues, enfin dans un quartier particulier. L'inauguration de la cathédrale Saint Nicolas ne commence que dans quelques heures. Beaucoup de miliciens quadrillent le secteur.

Tout objet suspect a été entreposé dans l'entrepôt des rebelles finnois, rien n'a été laissé dans leur dirigeable Les ailes d'argent au cas où. Les filles l'ont pour l'instant laissé au port aérien car il faut une autorisation spéciale pour le faire voler dans les environs. Ce qui est fort dommage mais elles comprennent.

La police est à cran et guette le moindre incident rebelle. Les filles se sont tenues tranquilles ces derniers temps. L'inauguration est un évènement heureux pour elles, détruire des symboles religieux moins. Et sauver les malheureux condamnés s'avèrent trop dangereux… C'était couru d'avance que la Milice réagisse particulièrement mal à cette bravade.

Les filles attendent avec impatience le discours du Cardinal Alekseï Viktovoritch Medvedev et espèrent avoir une autorisation de vol pour admirer les feux d'artifices de fin de soirée dans le ciel (elles pourront même vendre des tickets pour transporter des spectateurs).

Non, avoue Patya. Je n'ai pas souvent l'occasion de voir Moscou d'en-haut, à part depuis les passerelles les plus élevées. C'est ce que j'ai fait pendant la construction, pour mieux voir le chantier. La pose des cloches, c'était vraiment impressionnant.

"Vous devez beaucoup voyagé vous aussi, au sein de Moscou," remarque une Lumi rayonnante.
Ilma, plus réservée, sourit de même. Les années de mission leur ont donné un certain instinct pour classer les rencontres comme innocentes ou dangereuses. Et celle-ci semble faire partie de la première catégorie.

Oui, s'amuse Patya, vous êtes perspicace, je suis coursier. C'est d'ailleurs comme ça que je connais le Sergent Abramov, je lui livre un paquet deux fois par mois depuis deux ans. Et en parlant du loup (Patya n'aime pas cette expression, mais que voulez-vous), le Sergent se fraye un passage dans leur direction. Quand il croise le regard du garçon, il leur fait signe de le rejoindre. Venez, dit Patya plein d'espoir.

Les filles suivent le sergent, sans doute va-t-il leur annoncer la bonne nouvelle que leur autorisation est bien accordée.

Il les guide jusqu'à une des guérites d'inscriptions et les fait passer par l'arrière pour éviter les mouvements de protestations dans la queue. Là, un collègue du Sergent les attend avec un papier prérempli. Voilà. Vous n'avez plus qu'à mettre le nom du dirigeable, le nom du pilote et celui du propriétaire si ce ne sont pas les mêmes, et une signature ici, explique-t-il à l'intention des filles. Puis il fait un petit clin d'œil à Patya.

Ce n'est pas très classe de passer devant tout le monde… mais si ça ne prend que cinq minutes alors ça ne fera de mal à personne ! Lumi remplit et signe le contrat sous le regard d'Ilma.
"Si tout est en règle, maintenant, nous devons trouver des passagers ! Patya, tu es toujours partant n'est-ce pas ? Oh, j'ai hâte de voir le feu d'artifice !"

Tout est en règle, confirme Abramov d'un sourire entendu. Ça fait plaisir de voir des jeunes aussi travailleurs, approuve son collègue. Il leur adresse un signe de tête et retourne dans la guérite. Bon, je vous laisse, j'ai à faire. Tu me raconteras, Patya ! Mesdemoiselles, salue poliment le Sergent. Sur ces mots, il s'en va. Toujours partant ! lance le garçon avec enthousiasme en se tournant vers Lumi.

Les filles donnent donc un lieu de rendez-vous au garçon pour s'envoler après le discours du cardinal. Elles se mettent en quête de leurs passagers et le temps passe.
La soirée arrive, le cardinal prononce son discours. Un discours presque beau si le gouvernement ne persécutait pas les zootropes.

Patya quitte la place juste avant le jugement. Comme tout le monde ici, il sait parfaitement que c'est une mascarade de tribunal public. Les malheureux prisonniers n'ont aucune chance. Et il ne veut pas voir ça. Il file au point de rendez-vous retrouver Lumi et Ilma.

Cinq autres personnes attendent : un couple et une petite famille, d'origine plutôt modeste. Les deux pilotes dirigent leurs passagers vers une chambre différente du côté bâbord de la nacelle. Très vite, l'appareil quitte le sol et s'éloigne de la terre. Les hommes deviennent minuscules, indiscernables dans les ombres des lampadaires. La cathédrale dépasse les bâtiments à ses côtés. Résonne le son des cloches. Le premier feu d'artifice éclaire les toits autour.

Patya est complètement fasciné. Il ne peut pas détacher son regard de la Cathédrale tout au long de l'ascension. Son sourire émerveillé et ses yeux brillants lui donnent l'air d'un enfant. Quand les feux d'artifice éclatent, il laisse échappé un petit rire d'excitation. C'est encore plus magique qu'il ne l'avait imaginé.

Les dix minutes suivantes s'avèrent magiques. Les pilotes ont du mal à garder l'œil sur leurs appareils tant le spectacle est beau. Arrive alors le bouquet final, grandiose.
Quelques secondes s'écoulent, le temps de marquer ce moment. C'est comme si le temps s'était arrêté…
Mais le temps finit toujours par revenir et les filles redescendent bien vite sur terre.
"Alors, ça vous a plu ?" demande Lumi à ses passagers.

Patya garde les yeux rivé sur la ville tout au long de la descente, comme s'il pouvait ralentir la descente d'un simple regard. Il est complètement fasciné. C'était magique, répond-il avec un sourire immense.

"Tant mieux alors. Si tu veux repasser, Patya, tu sais où se trouve le port !" répond Lumi avec un sourire, laissant l'adolescent retourner à sa vie en emportant avec lui d'heureux souvenirs.