Rappel du premier message :

Aaron a la garde de sa fille, il rayonne de bonheur. En bon père, il a laissé sa fille se déguiser comme elle veut : en écureuil pour se promener au Central Park. Quant à lui, il aborde des moustaches et des oreilles de chat pour faire bonne mesure. Il aurait préféré en manchot mais ces volatiles ne sont trouvables à New York qu'au zoo.

Son épouse aurait soupiré en le voyant ainsi paré pour sortir. Elle lui reproche souvent de "ne jamais savoir quand s'arrêter" selon ses dires. Sa folie douce lui avait certainement plu au début mais il semblerait qu'elle en ait eu assez de ces fantaisies. Elle a même essayé de le blesser en disant que pour l'instant Luna support ce cirque car c'est encore une enfant mais qu'une fois adolescente ce serait différente. Aaron n'y a pas prêter trop grande attention car il sait que sa femme souffre. Elle lui manque.

"Papa ! J'ai vu un écureuil comme moi ! Mais il est parti...
- C'était sans doute pour t'offrir un gâteau aux glands, tu ne crois pas ?
- Je ne veux pas manger du gâteau ! (Pas encore.) Je veux jouer avec lui ! Oh des chiens !"

En effet, des chiens rechigneront moins à jouer avec la petite de dix ans.

Les oreilles se couchèrent plus loin le long de son crâne et le lycan détourna la tête, refusant de façon très mature de répondre ou même de regarder Aaron. Il aurait préféré la colère, c'était un terrain qu'il contrôlait mieux... Cazzo...

Hum.
Son interlocuteur semble honteux maintenant. Que faire ?
"Est-ce que vous avez songez à voir un thérapeute ? Je ne suis pas doué pour ce genre de chose. Je vous offre une crème glacé, ça vous dit ?" tente Aaron en désespoir de cause. La nourriture ça remonte le moral, non ?

La question lui fait agiter l'oreille à tic et il grommelle dans les poils de son museau. "Déjà le cas..." baragouine-t-il sans conviction. Mais sa Natalia intérieure, thérapeute qui le suit depuis dix ans déjà, le tanne d'arrêter de faire son ronchon. Il avait si bien commencé ! Mais maintenant, quand il lui racontera cette conversation, elle serait déçue... Peut-être pouvait-il encore redresser la situation catastrophique de cette puttana di socialisation foirée. "Vanille... Pour la glace..."

"Très bien !
- Moi je reveux pistache !" dit la fillette qui a entendu le mot magique et qui a toujours un creux.
"Vanille et pistache, c'est noté !"
L'homme-chat revient plus tard avec les déserts commandés.
"C'est très bien alors si vous voyez un thérapeute, il faut persévérer et se détendre ! Je ne sais pas comment vous faites pour être aussi agité tout le temps. C'est contagieux en plus."

Agité ? Si, sans doute. Ses émotions ont toujours été fortes, un raz de marée le submergeant, un cagnard qui le brûlait, un tremblement qui tonnait dans son coeur. "Grazie." dit-il seulement en acceptant la glace. Il serait sans doute plus poli de redevenir humain pour la manger mais Rosario se sentait toujours plus protégé sous sa forme lupine et il ne pouvait pas gérer les regards sans ses poils actuellement. Manger était apaisant, il en prit distraitement note. "Beaucoup de douleur, trop de rabbi... mmh colère." marmonna-t-il finalement, répondant à une vieille question.

"Donc rabbia veut dire colère et comment dit-on joie en italien ? Moi, je n'apprécie pas les barrières qui m'enferment, je mène ma vie comme je le souhaite et je suis très bien comme ça, voyez ? En ce moment, je suis sur une maquette de banquise, je l'ai en photo si vous voulez voir," dit Aaron totalement à l'aise avec cet homme rencontré il y a seulement une vingtaine de minutes.

"Gioia." répondit Rosario en regardant vers i suoi cani avec un petit sourire. Il caressa la tête de Grandenero qui s'était affalé contre sa cuisse, à l'opposé d'Aaron, et le regardait d'un air adorateur. "Faites voir." dit-il alors en finissant sa glace.

Aaron passe donc son téléphone, exposant la photo d'une banquise prise du ciel avec des manchots empereurs et un phoque. À bien y regarder, la résolution est trop nette pour une photo du ciel, il s'agit d'une maquette !

Rosario n'avait guère d'intérêt pour les manchots mais cet homme avait supporté ses sautes d'humeur sans s'énerver ni se barrer, il lui devait de continuer la socialisation. "C'est bien fait, signoro." dit-il sincèrement. "Je n'aurai jamais la patience." Pourtant ce serait intéressant de présenter les loups à travers le monde en exposition temporaire dans son restaurant, histoire de briser l'image du Big Bad Wolf... Il n'osait cependant pas demander.

"Merci, cela m'aide à me détendre."
Aaron qui a besoin de se détendre ?
"Est-ce que vous faites quelque chose d'artistique ?"

Les oreilles s'agitèrent. Artistique, lui ? "No. Mais je me détends en cuisinant." répondit-il. "D'où le restaurant." Les mots suivants se bousculèrent dans sa gueule avant qu'il ne réfléchisse à les retenir. "Vos maquettes, sono belle. Vous faites des loups ? Elles iraient bien dans le We're Wolves. Pour une expo... Non laissez tomber... cazzo." Son dernier sifflement s'adressait à lui-même et son incapacité à discuter calmement comme une personne lambda. Il se sentait s'énerver... tout simplement car il se mettait mal à l'aise tout seul.

"Je peux vous faire une maquette avec des loups, pas de problème ! Ça prendra un peu de temps, j'aurais besoin de savoir la surface disponible et ce que vous voulez pas de problème. Contre huit dollars ou un repas offert. Je préfère facturer, souvent on me commande des trucs puis on oublie et je me retrouve avec des maquettes qui ne sont pas pour moi."
Même Aaron s'étonne de créer du lien aussi vite !

"Huit dollars seulement ?" s'étonna sincèrement Rosario en clignant des yeux. Certes, il avait besoin de garder de l'argent de côté pour pouvoir retourner en Sicilia sans l'argent di suo padre mais il n'allait pas voler cet homme. "Ce serait pour présenter au public toutes les races et les modes dei lupi dans le monde. Loup canadien, loup arctique, loup polonais, loup sibérien, loup ibérique, loup italien, loup égyptien, loup indien, loup mongol, loup à crinière, loup d'Abyssinie, lycaon, loup rouge, loup mexicain, loup d'Arabie..." Il marmonnait son compte sur ses doigts. "Vous aurez plus de quinze repas gratuits."

Les huit dollars étaient plus un chiffre symbolique qu'une véritable estimation. Pas besoin de donner le prix juste, le simple fait de mettre un prix suffit à faire réfléchir les gens. L'homme-loup semble avoir de grands projets et est assez équitable pour ajuster le prix en fonction de sa gourmandise.
"Parfait ! Marché conclu !"
Et Aaron tend la main. L'homme-loup aime les rituels et en voici un ! Qu'ils se serrent la patte et la mimine !

Le Sicilien était trop dans son rêve éveillé de casser ENFIN la terribile reputazione dei lupi en pulvérisant le vieux mythe aberrant du Big Bad Wolf pour capter qu'il tendait sa grosse main griffue et poilue pour serrer celle d'Aaron. Ce ne fut qu'en manquant d'entailler sa peau tendre par mégarde - ses griffes étaient vraiment acérées - qu'il bondit en arrière en bégayant. "Scuzi ! J'avais oublié, cazzo !"

Aaron regarde calmement sa main légèrement entaillée. De petites gouttes de sang tombent sur l'herbe. L'homme-chat apprécie la douleur un moment avant de chercher dans son sac du désinfectant (là pour Luna d'habitude).
"Haha, je suis si maladroit."

"No, no, sono mio. J'aurais dû me retransformer, scuzi." continuait de baragouiner Rosario, son oreille à tic tellement agitée depuis une heure qu'il se demandait si ce ne serait pas lui qui aurait besoin de soigner des os brisés plutôt que Sorellina... qui bavait sur les vêtements della piccola Luna.

"Bon, serrons-nous la main, pour de bon ! Voici mon mail pour échanger vos informations et vous faire profiter de l'avancement du projet."
De son côté, Luna s'amusa beaucoup avec Sorellina et les autres chiens. Dans son cœur de petit écureuil, l'envie d'avoir un chien était de plus en plus fort. Épuisée mais ravie, elle suivit son père pour manger avant le feu d'artifice. au final, père et fille n'auront pas beaucoup échangé le frisbee mais ils se seront bien amusés.

Rosario redevint humain pour serrer la main pour de bon, grimaçant à peine du contact peau à peau dont il avait perdu l'habitude. Il passa le reste de l'après-midi avec la famille tant que la piccola Luna accaparait l'attention de Sorellina qui couina haut et fort au retour à la maison qu'elle voulait une petite deux-pattes-écureuil. Les autres chiens jappèrent leur accord, toujours heureux d'avoir des petits dans les pattes, et l'oreille de Rosario s'agita de plus belle.