Dans une serre utilisée  pour les cours de botaniques, une jeune adolescente n'hésite pas à passer de plantes en plantes pour les examiner et reconnaître leur espèces. Elle s'arrête devant un grand parterre bien particulier ; rempli de  sable et reproduisant des dunes miniatures,  des végétaux  résistant au manque d'eau y sont plantés tels l'aloe verae, des cactus.   Il y a le  cactus fier comme un capitaine d'artillerie  avec  ce que Luz surnomme  avec amusement "son gros nez", Il y a la paisible cactus en forme de boulet de canon, il y a le cactus qui semble donner des ordres  aux autres avec ses excroissances tel un général d'armée déterminé, il y a le cactus paresseux à l'écart des autres pousses, on aurait dit qu'il cherchait à faire bronzette.

Luz les abandonne à leur agitation soldatesque pour observer d'un air impressionnée les plantes carnivores qui prospèrent majestueusement sur une colonne soutenant le verre de la serre. Elle a la chance d'arriver au bon moment ; un malheureux insecte vient de déclencher le piège sucrée d'un d'entre eux. Oh ! La jeune fille est impressionnée par la réactivité  du végétal.  Elle n'a cependant pas que les plantes à observer ; s'en occuper est important aussi. Elle pense à l'esprit de la pluie qui pourrait être d'une aide précieuse et pour qui elle a un cadeau aussi singulier qu'elle !

Mais l'esprit de la pluie n'est pas près de la serre. La femme aux jambes et aux cheveux de brume volette dans le ciel à observer la Terre d'en haut. Tout parait si minuscule et insignifiante. Pourtant quand l'esprit se rapproche jusqu'à frôler l'humus, elle peut voir des êtres minuscules s'affairer, transportant des brindilles ou suçant la rosée du matin. Des araignées d'eau laissent des traces quasi invisibles sur la surface de l'eau. Si petits et pourtant si signifiants !

Luz avait lu dans un livre  que certaines plantes survivaient se comportaient en cannibale poussant sur leurs congénères pour survivre. La scène qu'elle vient lui y fait penser. Invoquer les esprits n'est pas simple, surtout un du calibre de l'esprit de la pluie. La sourde ânonne  une partie du rituel - la plus difficile - avant de commencer sérieusement. Il lui tarde d'offrir son cadeau !

L'esprit de la pluie sent un léger tiraillement, signe que quelqu'un pense fortement à la pluie. La belle dame se tourne vers la pyramide où se trouve les élèves shamans. Peut-être l'un d'entre eux tente-t-il de l'appeler. Mais l'esprit multimillénaire est bien souvent trop imposant pour les novices. Varsha décide de se rapprocher de l'école. De là où elle est, elle peut voir les nombreuses fenêtres de la pyramide et notamment la serre, coin de verdure piégé dans le verre.

Plus elle avance dans le rituel, plus le coeur de Luz se gonfle d'espoir peut-être y arrivera-t-elle à invoquer le puissant esprit ! Même si elle ne maîtrise pas bien l'articulation des mots de langue shamanique.  Elle échoue misérablement sans savoir exactement ce qui lui manque. Faut-t-il remettre à un autre jour sa promesse de cadeau ?

Pas de bol, le dé a dit:

Des gouttes de pluie tombent sur la serre. L'esprit admire les dessins que ces dernières forment sur les murs de la pyramide et sur le verre et écouter leur musique si particulière et relaxante, celle contre le verre tout particulièrement.

Luz lève le regard vers les fenêtres de la serre  sur lequel tombent silencieusement des gouttes de pluie. Elle les prend pour un signe qu'elle doit réessayer ! La  jeune fille répète le rituel d'invocation  qui échoue une fois de plus. Oh. Pauvre petite. Elle en a les larmes aux yeux. Pourquoi ne peut-t-elle pas invoquer aussi facilement que les autres ?

Une personne non loin d'ici pense à la pluie et la regarde. Varsha est toute heureuse et s'approche pour voir de qui il s'agit. Elle a la surprise de reconnaître Luz avec le regard triste ! L'esprit intangible traverse la paroi de verre.
"Petite shaman Luz, comment vas-tu ? Tu n'es pas heureuse ?" signe-t-elle.

Elle a mal mené sa barque avec ses deux invocations successives. Remarquant le fantôme qui traverse la paroi de la vitre, elle  reconnut de suite l'esprit de la pluie.  Pourquoi c'est si difficile de vous invoquer ? Les autres n'ont pas autant de mal que moi !, se plaint la jeune fille. Ce n'est pas possible de vous invoquer avec juste des gestes ?

Varsha écoute la petite shaman dépitée avant de signer à son tour :
"Les humains peuvent m'invoquer avec des danses en direction du ciel, pas besoin de mots même si des cris et des supplications sont bienvenus. Il faut tourner autour d'un bol vide et lever les mains vers le ciel tout en improvisant cette danse. Pourquoi n'essayes-tu pas ?"

La petite chamade sourde regarda l'explication gestuelle de l'esprit et hocha de la tête. Mais oui ! Il devait bien avoir des esprits qui répondaient aux danses ! Quelle idiote elle faisait à essayer de parler pour en invoquer ! Mais ce n'est pas important puisque Varsha est là ! Merci ! J'ai quelque chose pour toi, un vase qui veut faire de la pluie !

"Un vase pour moi ?! Oh ! Où est-il ?" demande l'esprit dont les gestes expressifs trahissent l'excitation.
Varsha penche la tête pour tenter de voir sous la cape de la jeune shaman.
"Tu l'as fait pour moi ? C'est très gentil !"

Luz ignora les pieds de plantes rusées comme des renards qui cherchait à lui parler de leurs milles et uns désirs, si elle avait pris le temps de les écouter une à une, elle aurait été sans doute rattrapée par la vieillesse ! Elle prend un curieux vase composé en réalisé de plusieurs vases comme une poupée russe et d'un trou central pour faire un effet de fontaine. Le plus incroyable était qu'on avait réalisé une décoration sur la surface du vase avec des sables de différentes couleurs.

"Oh ! C'est le plus original qu'on m'ait fait depuis longtemps. Je l'adore ! Merci Luz ! Demande-moi ce que tu veux, je ferais pleuvoir où tu le désires !"
Varsha est loin d'être ingrate, elle sait offrir en retour d'une flatterie ou d'un cadeau sincère.

Luz était ravie que l'esprit apprécie le cadeau !  Elle pourra avoir le droit de décider d'où faire de la pluie  ! Youhou ! Ça la faisait littéralement bondir de joie en tournoyant sur elle-même. La jeune fille indiqua ensuite les plantes qui avaient besoin d'être arrosée ; cela lui épargnera la corvée d'utiliser l'arrosoir pour les approvisionner.

Varsha sourit à Luz.
"Naturellement, je m'en doutais. Je te préviens que tu risques de te faire grondée si tu persistes. Acceptes-tu bien toutes les conséquences, même les mauvaises ?"
Varsha, de son côté ne risquait rien, elle n'avait fait qu'obéir à son invocateur.

Luz hausse les épaules, ce n'est pas qu'elle est paresseuse et qu'elle n'aime pas prendre soin des plantes, c'est juste que... voilà. Aujourd'hui, c'est ennuyeux. Qu'elle soit punie n'arrangera pas son caractère excentrique. Il y a plus de conséquences heureuses que de mauvaises.

"Très bien. Ouvre les fenêtres, veux-tu bien ?"
Varsha s'envole, traverse la paroi de verre et rassemble les nuages. Très vite, elle collecte leur eau avec le vase de Luz et faire tomber la pluie sur la serre.
Les gouttes de pluie frappent la surface lisse mais certaines ne rencontrent aucune résistance.

Chef, oui, chef !, s'écrie les doigts de Luz alors qu'elle se précipite pour se saisir de la longue tige utilisée pour faire pivoter les verres du toit de la serre. Hop ! Hop ! L'équilibre qu'elle a avec ce bâton en l'air est parfois fragile, presque comme si elle manquait de lâcher.

La pluie passe à travers les fenêtres et atteint certains pots mais pas tous. Varsha augmente la concentration d'eau, c'est un véritable déluge qui fait apparaître quatre centimètres d'eau dans la serre mais certaines plantes ne sont toujours pas mouillées !

Luz se fait copieusement tremper par le déluge déclenché par Varsha mais ce n'est pas grave, les petites plantes sont nourries ! Puis elle remarque que certaines n'ont pas eu d'eau. La petite s'en va chercher un arrosoir fou de joie et le met sous la pluie. Tu peux te concentrer sur l'arrosoir fou de joie ?

Varsha entend la prière de Luz et calme la pluie sauf à la fenêtre où baigne la petite chamane. L'arrosoir est très vite remplie. Du haut du ciel, l'esprit voit des chamanes tourner la tête pour la voir.

Une fois l'arrosoir plein, Luz signale à Varsha d'arrêter de faire pleuvoir. Le curieux phénomène au-dessus de la serre doit avoir attiré pas mal d'attention. Mais Luz n'en a cure, n'ayant que de yeux pour les petites plantes, elle verse le contenu de l'arrosoir sur les plantes que la pluie n'a pas atteinte.

Varsha voit la petite chamane agiter les mains dans sa direction. Elle reprendra sa pluie quand la petite aura finit l'arrosoir. Des chamanes surgissent dans la serre et interpelle la jeune sourde.
"Qu'est-ce que tu fais ? La serre est inondée ! C'est toi, c'est ça ?!"

Les petits signes de main au-dessus de la tête du shaman s'agitent beaucoup, il doit être un peu en colère et paniqué.  La serre n'est pas inondée ; elle avait soif,  je lui ai donné à boire.