Eh ben, moi qui me voyais déjà lui faire répéter son pas sur le côté pendant trois heures... le voilà déjà en train de décider tout seul comme un grand de la direction à prendre. "Souple. Tu portes pas un vase en cristal, et je vais pas m'évaporer. Détends-toi."

"Mmm" On ne sait jamais. Il regardait sa soeur tourner sur elle même, bras écartés en regardant le plafond de la mine un jour et le jour d'après (ou ce qui en a semblé) elle était morte, brisée, partie à jamais. Il s'arrête, recule d'un pas, la regarde. L'image de la disparue se superpose à la sienne mais il ne craque pas. Il tient bon. Se renferme. Il ne sait pas ce qui lui arrive aujourd'hui. Il pensait avoir colmaté la brèche pourtant.

J'ai dit quelque chose qu'il fallait pas ? On dirait. Je le regarde se ratatiner et s'éteindre. Métaphoriquement parlant hein, il est pas roulé en boule comme tout à l'heure. Pourtant j'ai rien fait pour..? Je garde ma main dans la sienne, je m'y tiens même. "Qu'est-ce qui se passe, Syl. J'ai fait quelque chose ?" J'aime pas faire du mal sans raison, quoi qu'on veuille bien penser de moi.

"Je suis fatigué." Ca marche bien comme phrase, généralement, quand on répond ça, les gens vous laissent tranquille. Sans oublier que c'est vrai, la douleur fatigue. Ils doivent s'entraîner dans... il regarde sa montre...pas tant de temps que ça. Mais il n'oublie pas qu'on lui a ordonné de distraire Sara. Il réfléchit. "Permission d'aller me doucher ?" une autre hésitation quant au grade à utiliser "Professeur ?"

Je secoue la tête, un peu désolée. Je fais même pas l'effort de cacher que j'en crois pas un mot. ..."professeur". Je bugue. "Si tu commences à m'appeler professeur pour trois pauvres pas, comment je vais devoir t'appeler tout à l'heure moi hein ? Capitaine ?" Je me rapproche. "Reste à Sara, va." Je tente un sourire mutin, pour voir si j'arrive à le dérider un peu. "Permission de voir ça ?"

"Si tu veux." Il s'en fiche, il veut juste se doucher et se coucher et fermer les yeux. Normalement, il refuse de s'allonger en dehors des heures prescrites de travail mais là. C'est spécial. Il doit être malade. Il faudrait du bouillon de viande avec des pâtes. C'est ce que l'on mange lorsque l'on est malade. Il soupire, attrape les bancs, commence à remettre la pièce en ordre.

Rien à foutre évidemment. Je hausse les épaules, désabusée. "J'vais pas aller dans les douches des messieurs, ça se fait pas il paraît." Je l'attrape quand il pose son premier banc et je dépose une bise rapide dans son cou. "Allez file, je peux ranger ça toute seule." Ca m'occupera.

Il se redresse, la regarde un peu puis décide qu'elle dit ce qu'elle pense et qu'elle saura seule se retrouver. Il suffit de suivre les lignes. Ils ne sont pas dans une zone protégée. "098. Mes quartiers." Au cas où ça l'intéresserait. Au cas où elle en aurait besoin. "1600h au gymnase." Il hésite. "Ou 1530 mes quartiers."

Je note, dans ma tête, avec un sourire entendu. "Ca marche." Je le regarde, ce grand bloc de marbre avec une fissure cachée au milieu, et je me dis que peut-être qu'elle est tellement grosse, cette fissure, qu'on la voit pas à moins de faire très, très attention. "Eh, Syl." Je me glue pour lui passer la main dans les cheveux. "On reprendra une autre fois, hm ?"

Il se retourne, elle se glue, passe sa main dans ses cheveux. Lui se demande un moment ce qu'elle fait, pourquoi, sans y voir consciemment le retour de ce qu'il a fait lui, pour elle, plus tôt. Il la regarde, ni inquiet ni rassuré, fatigué juste de respirer. "Si tu veux."

"Tu t'en sors bien Syl. Faut pas lâcher, hm ?" Ni la danse, ni le reste. Surtout pas le reste. Je me redresse en lui collant une petite tape sur la joue. "Allez ouste, à la douche !"

"Mm" Il n'y a pas grand chose d'autre à dire à ces encouragements. Il y repensera peut-être, plus tard. Ou pas. Il se redresse, se raidit un peu devant l'ordre, par réflexe avant de se rappeler qu'elle n'est pas une supérieure hiérarchique et hoche la tête avant d'obéir quand même.

Je souris en le voyant se raidir, il est marrant. Ca se fane dès qu'il a quitté la pièce. Je chope mon machin à bips et je le passe en mode musique, puis je retourne ranger mes bancs. Je me presse pas. J'ai le temps. Puis comme j'ai toujours le temps et qu'il est presque la demie je pars en quête du 098 et je vais toquer à la porte.

On frappe. Allongé sur son lit après la douche, Sylomen regardait le plafond. Il se lève, active le com', regarde qui frappe. Sara. Il va pour ouvrir, se rappelle de sa tenue, s'arrête, va se chercher un dessous et un pantalon d'entrainement qu'il enfile avant d'activer la porte, tournant le dos à celle-ci, à la recherche d'un haut d'entrainement avec ses nouveaux galons de Capitaine. Tout est bien rangé. Cela ne l'empêche pas de bugguer un peu devant la pile de T-shirts.

"Dessin." Comme il n'a pas envie de passer trois heures à s'expliquer et qu'il se dit qu'elle n'a pas du le surprendre dans ses moments de dessin à la Cabine, il ouvre un portrait de Ryot qu'il a reproduit de mémoire pendant un moment de calme, tourne la tablette et lui montre son "oeuvre". "Pas terminé". En effet, on voit encore les traits de constructions et quelques traits ratés mais les volumes sont là et on reconnait très bien le demi-telun augmenté.

J'arrive pas à retenir une grimace. "Yeurk. C'est beaucoup trop ressemblant." Mais ça éveille mon intérêt. Il sait clairement ce qu'il fait.

Il a une ébauche de sourire au fond des yeux à cette réaction, comme un éclair qui est vite étouffé sous un battement de paupière. Il cherche dans sa bibliothèque, trouve un dessin finalisé du Capitaine de Corvette avec derrière la silhouette tout juste esquissée de Mao, l'Ombre de l'Armure. Il a gardé malgré le côté onirique du garde du corps, un style très réaliste pour son Commandant. Il l'affiche en plein écran, tourne l'engin et montre sa composition à la jeune femme.

"Mais t'es doué en fait." Bon, le choix des sujets m'enchante pas forcément, mais je peux pas dire que c'est mal fait. "D'après nature ou de mémoire ?"

"Les deux ?" Il n'imagine pas vraiment, il regarde, il observe, il retient mais il n'a jamais dit à son Commandant et à l'adjudant "bougez pas, je vous dessine". "Mémoire sur sujets réels." Il hésite, puis se lance, cherchant un croquis de Sara à la Cabine, avec une expression concentrée sur le visage. Quand il se demande à quoi elle peut bien penser et ce qu'il se passe dans la tête de ce concentré d'émotions pures.

Il la regarde un moment, comme cherchant quelque chose autant sur son visage à elle que dans son esprit à lui. Et puis... "Non, ça va."

J'lui fais un sourire radieux. "Tu sais parler aux Sara toi..." je ronronne. Je lui rends sa tablette à regret. "T'en as fait d'autres ?"